Les stèles provençales néolithiques gravées sont bien connues avec plus de cinquante exemplaires. Les deux stèles de Gargas ont été découvertes à l'occasion d'une prospection de surface sur les marges nord de la plaine du Calavon à environ 45 km à l'est d'Avignon. C'est là une région de grande densité de gisements néolithiques dont plusieurs ont fait l'objet de fouilles : la Brémonde à Buoux, les Martins à Roussillon, les Fabrys à Bonnieux et le dolmen de l'Ubac à Goult.
La stèle 1 est entière mais localement altérée et sa surface est encroûtée. On peut cependant reconnaître un calcaire dense et fin. La forme est triangulaire. Les flancs et le sommet sont faiblement convexes. La face est légèrement concave et témoigne d'un travail de dressage avant la réalisation du décor. Au centre, la partie réservée n'est pas en creux comme c'est généralement le cas sur les stèles provençales. Elle est détériorée. Cette zone réservée verticale, est resserrée à mi-hauteur puis s'évase vers le bas. Les détails anatomiques, bloc sourcils-nez-yeux, ne sont pas visibles du fait de la détérioration, mais ce qui reste de la zone ne montre ni relief ni creux. De part et d'autre deux bandes margées verticales sont gravées de hachures obliques simples. A la partie supérieure, le décor est constitué de quatre registres : deux bandes horizontales lisses, une bande de chevrons simples horizontaux, deux bandes horizontales de hachures obliques de droite à gauche et une bande de chevrons doubles horizontaux. Le décor gravé est rehaussé de pigment rouge vif déterminé comme du cinabre.
La stèle 2 n'est pas totalement intègre, la base est absente. L'ensemble de la surface est encroûté. Le matériau utilisé est un peu plus grenu que celui de la stèle 1. La surface de la face, plate à localement convexe, ne semble pas avoir été dressée. Le décor est gravé, rehaussé de couleur rouge vif, également du cinabre. Il est moins soigné que celui de la stèle 1. Il est organisé en trois zones autour de la surface réservée verticale qui ne porte ni creux, ni relief sculptés, ni apparemment de couleur. Les attributs anatomiques, bloc sourcils-nez-yeux, ne sont pas représentés. Les bandes verticales latérales sont constituées de hachures obliques. A la partie supérieure on observe deux bandes horizontales : une bande étroite dont le décor est difficilement lisible et au-dessus une frise de chevrons. La structure globale de ce décor est conforme à celle observée sur les autres stèles provençales, mais la bande centrale est originale par sa forme et l'absence de figuration.
La localisation de la découverte, au nord du Luberon, dans la partie nord de l'aire de répartition des stèles provençales, confirme que plusieurs sont liées à la vallée du Calavon, comme d'autres le sont à celles de l'Arc et de la Durance.
Si la structure du décor des stèles de Gargas est conforme à ce qui était connu, dans le détail il y a des aspects originaux : la forme du visage est à bords évasés vers le bas et ne fait apparaître ni le nez, ni les yeux.
Les stèles de Gargas ont été recueillies en surface et le mobilier associé indique qu'il y avait là un contexte, probablement mal conservé du fait de la localisation du site et des labours successifs. Un premier examen montre une très grande homogénéité. L'industrie en silex taillé est très majoritairement sur silex « blond » de la région de Murs. La station a également livré des pièces en obsidienne du Monte Arci en Sardaigne.
Bien que généralement privées de contexte les stèles provençales gravées sont bien datées. Elles ont toujours été attribuées au Chasséen récent. Elles seraient donc antérieures aux manifestations de la grande statuaire de la fin du Néolithique. Les découvertes de Gargas semblent le confirmer; elles s'inscrivent dans un cadre chronoculturel de la fin du Néolithique moyen entre 3800 et 3600 av. J.-C.
Si la datation des stèles provençales semble établie, il n'en n'est pas de même pour leur contexte précis et leur fonction. Un lien avec des faits funéraires peut-être évoqué, mais les stèles ne sont pas directement associées aux sépultures. Par ailleurs, aucune des grandes nécropoles à sépultures en fosses de la fin du Néolithique moyen ne livre de tels monuments. Il semblerait donc que les stèles provençales constituent un phénomène qui pourrait être associé à des locus particuliers d'établissements plus vastes comme cela est le cas apparemment à Beyssan.
The Provence Neolithic stelae with chevron ornamentation are well known, with more than fifty monuments currently recorded. The two new stelae from Gargas were discovered during a field survey on the northern border of the Calavon plain, about 45 km east of Avignon. The area has a high concentration of archaeological sites, many excavated in the past: La Brémonde (Buoux), Les Martin (Roussillon), Les Fabrys (Bonnieux) and the Ubac dolmen (Goult).
Stela 1 is complete but deteriorated in places. Its surface is encrusted. It is however possible to identify the stone as a compact, fine limestone. The general shape is triangular, with the sides and top slightly convex. The slightly concave front face indicates that the surface was pick-dressed prior to being decorated. The reserved part at the centre is deteriorated. It is not hollowed as it is usually the case for Provence stelae. This reserved vertical area narrows in its middle then gets wider towards the bottom. Anatomical details such as the eyebrows-nose-eyes block are not visible because of the deterioration of the stela but what is left of the reserved area does not show any relief or hollows. Two vertical bands decorated with parallel oblique lines running outwards are engraved on both sides of this area. The ornamentation on the top part consists of four levels: two smooth horizontal bands, one row of simple horizontal chevrons, two horizontal series of parallel oblique lines, and one row of double horizontal chevrons. The engravings are enhanced with a bright red colour which has been identified as cinnabar.
Stela 2 is not complete: its base is missing. Its whole surface is encrusted. The raw material is a little more grainy than the one used for stela 1. The flat, locally convex, main face does not seem to have been pick-dressed. The ornamentation is engraved and also enhanced with a bright red colour here again identified as cinnabar. It is simpler and less carefully made than on stela 1. It is organized in three areas around the vertical reserved surface, which does not seem to have hollows, sculpted reliefs or colour. No anatomical details (eyebrows-nose-eyes) are represented. The lateral vertical bands are simple, consisting of series of parallel oblique lines running outwards. Two horizontal bands appear on the top part of the stela: a narrow band, whose ornamentation is difficult to see, above which is a series of double chevrons. The overall structure of this artwork is in accordance with that seen on other stelae in Provence, but the central band, with its form and lack of any realist figuration, is a more original feature.
The site of the discovery, on the Calavon plain (North Luberon), is in the northern part of the distribution area of engraved stelae. This confirms that several stelae are associated with the Calavon valley, in the same way as other stelae groups are associated with the Arc or Durance valleys. The two Gargas stelae are part of a group initially called B, then ???Lower-Durance group??? or ???chevron-ornamented stelae group or Durance-group???. The ornamentation on these stelae is limited to the representation of a head consisting of the shape of the face, hollowed out, and a series of chevrons carved in relief. The ornamentation on the Gargas stelae is not in relief but engraved. Following Gagnière and Granier???s definition a third group (stelae with painted ornamentation, or Château Blanc type) was identified, including the stelae from Château Blanc (Ventabren) and those from Goult/Ubac. These were carefully shaped, were not engraved but have traces of red pigment. While the overall structure of the engraved ornamentation of the Gargas stelae is consistent with what was already known, some details are more original: the shape of the face has sides widening towards the bottom and does not include a nose or eyes.
The two stelae from Gargas were unearthed subsequently to ploughing and associated material points to evidence for a context which is probably poorly preserved due to the location of the site and regular agricultural work. This material is a particularly spectacular assemblage as is sometimes found in Vaucluse. It comes from various locations around Beyssan. A first examination shows significant homogeneity. Chipped flint tools dominate the assemblage, with a majority of ???blond??? flint from the area of Murs. Besides flint, the site has yielded finds in obsidian originating from Monte Arci, Sardinia.
Though generally found outside any archaeological context, Provence stelae with chevron ornamentation are relatively well dated. They have always been dated to the Middle Neolithic, and more exactly to the Late Chasséen. They therefore precede the tradition of large anthropomorphic statuary of the end of the Neolithic period. The Gargas discoveries confirm this; their chrono-cultural context dates to the end of the Middle Neolithic, between 3800 and 3600 BC.
While the Provence stelae can be considered as well dated overall, the nature of their context has not yet been well understood. A link with funerary practices is obvious at Goult and Château Blanc and can be suggested at Bastidonne and maybe at Puyvert. However, stelae are not directly associated with burials. Moreover, late Neolithic cemeteries which have been extensively excavated have not yielded such monuments. It seems therefore that the Provence stelae are a particular phenomenon, which could be associated with sites of an ???intermediary??? type, which could have been specific places associated with larger settlements as seems to be the case at Beyssan [translation Guillaume Robin].
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Le site magdalénien de Saint-Germain-la-Rivière (Gironde, France) a régulièrement été sollicité dans le cadre de plusieurs débats concernant le Paléolithique supérieur récent d'Europe de l'Ouest. L'essentiel de ces travaux s'appuient sur l'analyse, d'une part, du matériel mis au jour par R. Blanchard, notamment la célèbre sépulture et, d'autre part, de celui provenant des fouilles plus méthodiques conduites par G. Trécolle dans le talus. A la suite de l'étude de l'ensemble des collections menée par M. Lenoir qui a permis d'attribuer les différentes occupations du gisement (talus et terrasses) aux phases inférieure et moyenne du Magdalénien, plusieurs travaux individuels ont été réalisés sur différents registres (lithique, parure, ossements). Une réévaluation collective dans un cadre stratigraphique critiqué et chronologique renouvelé s'avérait néanmoins nécessaire.
Afin de préciser le processus de mise en place du Magdalénien dans sa période « classique » (phases moyenne et supérieure), des membres du projet « Magdatis » ont analysé plusieurs gisements attribués au Magdalénien moyen ancien de Gironde. La séquence des fouilles Trécolle s'est naturellement placée au coeur de nos recherches. Dans un premier temps, un retour sur les archives de terrain laissées par ce fouilleur minutieux a été nécessaire. Cette révision archéostratigraphique a conduit à répartir une large part des vestiges en deux ensembles tout en pondérant certaines interfaces problématiques. Partant de cette nouvelle proposition de découpage de la séquence, une réévaluation du matériel archéologique a été entreprise. La comparaison des industries lithiques et osseuses apporte de nouvelles données concernant la nature des comportements techniques et économiques de ces premiers moments du Magdalénien en Europe de l'Ouest. Du côté des matières premières lithiques ou osseuses, on note une certaine continuité des deux ensembles. La gestion différentielle de l'outillage domestique et de l'équipement de chasse en silex s'avère également un levier dialectique efficace pour appréhender la transformation de ces sociétés de chasseurs-cueilleurs. L'industrie osseuse montre, entre les deux ensembles, des éléments de continuité (extraction de baguettes par double rainurage) et des différences (dans l'ensemble supérieur : outillage moins diversifié, objets décorés plus fréquents). La systématisation d'une production laminaire normée dans la seconde phase s'accompagwne d'une augmentation des gabarits des pointes osseuses. La confection de morphotypes différents d'armatures lithiques (microlamelles à dos vs lamelles scalènes) et l'évolution des types de base des pointes osseuses mais aussi la présence ou non de rainures illustrent une recomposition de l'armement. La révision de la faune a également permis de préciser chacun des ensembles et, grâce à l'étude taphonomique, les tableaux de chasse respectifs. Des différences dans les stratégies de chasse des saïgas (groupes de femelles ou hardes mixtes) et leur traitement (intensité de la recherche de moelle, techniques de fracturation) sont notées. La mise en évidence d'une exploitation de gibiers de petite taille (avifaune et mésofaune) dès les premières occupations magdaléniennes vient compléter l'image de ces chasseurs d'antilopes et de rennes. Le croisement des différentes données offre l'opportunité de préciser les processus et les rythmes des changements techniques et économiques qui marquent cette période. De nouvelles datations 14C directes sur espèces ou objets particuliers permettent en outre d'éclairer sous un nouveau jour deux étapes de mise en place du Magdalénien. La séquence des fouilles Trécolle peut ainsi être replacée dans l'ensemble du site de Saint-Germain-la-Rivière et comparée à d'autres gisements contemporains d'Europe de l'Ouest.
The Magdalenian site of Saint-Germain-la-Rivière (Gironde, France) has often figured in debates and discussions about the Late Upper Palaeolithic of Western Europe. Most of the discussions are based on the material excavated by R. Blanchard in particular the now well-known burial as well as the more rigorous excavations by G. Trécolle in the slope deposits. After the detailed study of all this material by M. Lenoir, which allowed the material from the slope and terrace deposits to be attributed to the Lower and Middle Magdalenian, many other studies were carried out by various researchers on specific aspects of the collections (lithics, personal ornaments, fauna). It became clear, however, that the stratigraphic framework and chronology of the site needed to be reexamined.
In order to understand the rise of the classic Magdalenian in Gironde, members of the Magdatis project reexamined many early Middle Magdalenian sites and collections of that area. The thorough work of Trécolle at Saint-Germain-la-Rivière was pivotal to this reassessment. Initially, this involved the analysis of his fieldnotes which led to an archaeostratigraphic reattribution of most artefacts into two principal units, with a potentially problematic interface between these. Once these new archaeostratigraphic divisions had been determined, analysis of the artefacts could proceed. The comparison of the lithic and bone/antler industries with those of other sites has afforded us new insights into the nature of the types of technical and economic behaviour of this initial Magdalenian in Western Europe. In terms of lithic and osseous raw material, we have found a good degree of continuity between the two units. The differing treatment of domestic versus hunting flint tools is also an important aspect to consider in the discussion of the changes that took place in hunter-gatherer societies at this time. The bone/antler industry shows some continuity between units (for example the use of the groove and splinter technique), but also some differences (in the upper unit: less diversity in tools; a higher frequency of decorated objects). The systematization of standardized blade production in the upper unit is accompanied by an increase in size of antler points. The production of different lithic projectile morphotypes (backed microbladelets versus scalene bladelets), in parallel with a change in base types within antler points, in addition to the presence or absence of grooves, demonstrate that changes occurred in the toolkits used. A reassessment of the faunal remains also helped to clarify the practices having occurred in each of the two principal stratigraphic units; combined with a taphonomic analysis, the specific subsistence practices in each could be identified. Different hunting strategies were noticed regarding saiga antelope (hunting within female groups versus mixed herds) as well as differing carcass treatment (degree of intensity of marrow extraction, carcass processing techniques). Our analysis also revealed that small-game hunting (birds and small mammals) had already been practised in the earliest Magdalenian phases at the site, thus providing a more complete picture of these reindeer and saiga antelope hunters. Taking into account all of these data and practices allows us to be more specific about the type and pace of technical and subsistence changes having occurred during this period. New 14C dates taken directly from bones of identified species or characteristic organic artefacts also aid us in shedding new light on the two main phases of the Magdalenian. The Trécolle excavation and its collections can thus be placed within the overall Saint-Germain-la-Rivière site sequence and compared with other contemporaneous sites in Western Europe which have also benefited from a renewed stratigraphic, archaeological and chronological assessment and framework.
Les récentes fouilles réalisées en Haute-Normandie par l'INRAP ont permis de placer cette région au sommet des découvertes pour la période de la fin du Paléolithique (Acquigny, Calleville et Alizay). Les études typo- technologiques ont livré des informations qui soudent les gisements entre eux et ne font plus aucun doute concernant leur homogénéité et leur contemporanéité. En 1998, l'un d'entre nous (D. P.) découvrait un petit amas de débitage bien conservé à Notre-Dame-de-l'Isle « la Plaine-du-Moulin-à-Vent » (Eure). Un an plus tard, R. Martinez mit au jour un autre amas, technologiquement très semblable, à Guerny « le Bois-Madame » (Eure). L'un des intérêts majeurs d'un des amas tient à la présence d???un percuteur en calcaire et à celle de produits de taille présentant des stigmates de percussions semblables à ceux obtenus au percuteur en bois de cervidés. Les nombreux remontages issus de ces deux concentrations permettent d'envisager la reconstitution d'une grande partie de la chaîne opératoire et de réfléchir sur les véritables intentions de l'utilisation d'un tel percuteur. Est-il volontairement utilisé ou est-ce une utilisation opportuniste ancrée dans une tradition de tailleurs à la pierre tendre? Les caractéristiques de ces deux postes de taille (production laminaire et lamellaire débitée à la pierre tendre) avaient été attribuées à l'époque, à titre d'hypothèse, à l'extrême fin du Paléolithique, ce qui paraissait cohérent avec la position stratigraphique de l'un d'entre eux. Dans le cadre de cet article, nous proposons de revoir avec plus d'acuité ces deux concentrations sur le plan technologique en les soumettant à des comparaisons avec les dernières découvertes régionales. Nos résultats tendent à confirmer les hypothèses chrono-logiques émises auparavant et de proposer quelques idées concernant l'emploi d'un percuteur en calcaire. Ces postes de taille ponctuels et leur bon état de conservation sont aussi des témoins privilégiés qui fournissent une lecture technologique d'une partie d'une chaine opératoire que l'on suppose avoir été pratiquée uniquement par un ou deux tailleurs. Cette lecture rend compte assurément plus précisément de la spontanéité d'un mode opératoire et de ses objectifs immédiats qui se percevraient plus difficilement ou différemment sur de grands amas. Ces postes de taille s'avèrent également des témoins précieux des déplacements propres au mode de vie des chasseurs nomades et pourraient contribuer à mieux connaître leurs réseaux de circulation.
The region of Upper Normandy has recently been highlighted by numerous finds of Late Palaeolithic campsites. Technological and typological studies of the lithic artefacts have yielded information linking the sites and revealing their homogeneity and contemporaneity. In 1998 and 1999, two similar knapping spots were uncovered at Notre-Dame-de-L'Isle and Guerny (Eure).
One of these knapping spots has yielded a limestone hammer and lithic artefacts with percussion marks similar to those obtained with an antler hammer. Lithic refitting of both concentrations has allowed the identification of most of the technological process and the motives behind the use of such a hammer, whether voluntary or opportunistic, in relation with a traditional use of soft stone hammers.
The main tendencies of these two knapping posts (blade and bladelet production knapped from soft stone) were at the time attributed to the extreme end of the Palaeolithic, which was coherent with the stratigraphic position of one artefact. In the framework of this paper, we propose to review these two concentrations with greater precision regarding the technological aspect by comparing them with the most recent regional discoveries. Our results confirm the previous chronological hypotheses and allow us to propose some ideas concerning the use of a limestone hammer.
These very well preserved small knapping spots highlight a specific sequence of the chaîne opératoire, probably executed by only one or two individuals. Spontaneous processes as well as the immediate objectives have been specified. Such identification would probably not be possible on larger flint knapping spots. Short-term campsites such as Notre-Dame-de-L'Isle and Guerny can also contribute in a significant way to our comprehension of these nomadic populations and their territorial mobility.
Au cours du Bronze moyen, la production métallique est caractérisée, entre autres, par la diffusion de parures annulaires originales, massives et portant un riche décor incisé, qui constituent la forme de parure majoritaire au sein des dépôts de cette période en France de l'Ouest. J. Briard (1965) fut le premier à individualiser ces objets, auxquels il donna le nom de bracelets du type de Bignan, d'après un dépôt morbihannais en contenant dix-huit exemplaires. Présents très fréquemment dans les dépôts du Massif armoricain, ces objets sont depuis indistinctement désignés ainsi lors de leur découverte. Il semble désormais nécessaire de revenir sur cette dénomination, qui regroupe des productions parfois très différentes, et qui ne permet pas la prise en compte des particularismes morphologiques et décoratifs régionaux.
La présente étude concerne les parures annulaires découvertes en Bretagne, Pays de la Loire et Basse-Normandie, une aire géographique formant une zone relativement homogène pour ce type de productions. Les régions Haute-Normandie, Poitou-Charentes, Aquitaine, Île-de-France et le Sud de l'Angleterre ont livré des objets relativement proches, mais dont la morphologie et le décor se distinguent cependant par des caractéristiques régionales propres. Ils seront donc également étudiés ici afin de replacer le Nord-Ouest français au sein d'un phénomène qui apparaît généralisé à l'ensemble de l'Europe atlantique.
Il convient aujourd'hui de déterminer les ressemblances et différences existant entre les zones de concentration de ces objets, ainsi que de tenter d'en déceler les mécanismes de production, d'utilisation, d'échange et de dépôt. L'étude précise de la répartition géographique, des contextes de découverte, des caractères morphologiques et décoratifs de ces éléments de parure permet de proposer une classification renouvelée ainsi que la définition de plusieurs groupes de production. Les différentes zones géographiques étudiées ici présentent des combinaisons préférentielles de critères morphologiques et décoratifs, liées à des choix techniques, symboliques ou esthétiques, nécessitant une reprise des données concernant la typologie et la terminologie des bracelets du type de Bignan.
During the Middle Bronze Age, metalwork is mostly characterized by the spread of original, massive annular ornaments: bracelets and anklets, bearing rich incised designs. With palstaves, those annular ornaments are the main artefacts found within the hoards of this period in western France.
J. Briard (1965) first individualized these objects, naming them Bignan-type bracelets after a hoard in Morbihan, where eighteen of them were discovered. Such specific personal ornaments have since been vaguely named thus when discovered, mostly in hoards of the Armorican Massif. It now seems necessary to reconsider this designation, which associates objects that are at times very different and to take into account their specific characteristics from a morphological, ornamental, technological, contextual and regional point of view.
This paper, which is the result of ongoing doctoral research, aims to propose a new and original typology for such massive annular ornaments and highlight different regional groups. Their production and burying appear as a widespread phenomenon in Atlantic Europe, also expanding beyond that area. This study also tries to evaluate the role of North-Western France within this wider trend.
A historiographical assessment illustrates the evolution of the bracelet issue throughout research regarding the Bronze Age. Then, in order to propose a new analysis of these massive annular ornaments, a comprehensive database was compiled, from museums and bibliographic data.
This study focuses on the five hundred and seventy-five bracelets and anklets found in Brittany, Pays de la Loire, Normandy, Poitou-Charentes, Aquitaine and Île-de-France. Fifty from Southern England are also used for comparison.
Armorica (corresponding to the French administrative regions of Bretagne, Pays de la Loire and Basse-Normandie) is a relatively homogeneous geographic area as regards the type of production and the context. Concerning the context, hoards are generally stereotypical, containing essentially palstaves and/or massive annular ornaments. Concerning the type of production, plano-convex or concavo-convex sections constitute the main shape, which may be decorated with patterns organized in symmetric panels, or without any decoration at all.
Two hundred and eighty-seven massive annular ornaments are also known in other regions of the corpus. However, they seem to differ from the Armorican type in their morphological or/and decorative features and present their own local characteristics. Two other groups can be identified: the first one around the lower and middle Seine Basin, and the second focused on Central-Western and South-Western France.
We now have to determine the common and distinctive features existing between the areas of concentration of these bracelets and try to unveil the different mechanisms of production, use, trade and burial. Careful study of the morphological and ornamental aspects of these annular ornaments, their geographic distribution and discovery contexts, enables a renewed classification to be proposed as well as a description of several production groups. The different geographic areas studied here present preferential criteria of morphological and ornamental features, following technical, symbolical and aesthetic choices, implying a review of data concerning the typology and terminology of the Bignan-type bracelets.
Morphological criteria of bracelets and anklets will be placed at the centre of this study, especially the general shape (penannular, joined or annular), section shape (plano-convex, concavo-convex, biconvex, quadrangular, triangular or diamond-shaped), and, to a lesser extent, the shape of the extremities. These typological elements can inform us directly about procedures in the operational chain of bracelet production, and their variations from one region to another. Technological and morphological aspects are both obviously linked.
Particular attention will be paid to the incised decoration: indeed, geometric patterns represented on the bracelets seem to be subjected to some codes, but only part of these codes can be understood. Precise analysis of the organization and shape of patterns have delivered convincing results showing regional and micro-regional preferences.
Depositing processes will also be closely studied, in the light of recent discoveries for which the context is well known, such as the hoard of Saint-Lumine-de-Clisson, Loire-Atlantique (Boulud-Gazo et al., 2012), Domloup, Ille-et-Vilaine (Sicard, 2012), or Trégueux, Côtes-d'Armor (Aubry, 2012). Valuable information is supplied by the rare funerary contexts, which inform us, in particular, about the way these personal ornaments were worn. The necropolis of Ouches (Auzay, Vendée) constitutes an important data source: twenty-four bracelets and anklets were found in their initial position, worn by both men and women (Lourdaux and Gomez, 1998). These discoveries allow the nature of the cultural practice behind the production and depositing of the massive annular ornaments to be considered.
This paper attempts to gather and synthesize the current state of knowledge about massive annular ornaments of the Middle Bronze Age. An accurate classification is proposed, using different criteria that help us define three regional groups. These promising results are a first step, raising issues that I will further develop in my thesis. The typo-chronology will be refined and applied to a wider geographic area, technological concerns will be developed and hypotheses tested by archaeological experimentation.
Dès le xviiie siècle, les haches à douille en bronze dites de type armoricain, particulièrement abondantes en Bretagne et en Normandie, ont fait l'objet de débats, tant quant à leur finalité qu'à leur datation. Ala fin du xixe siècle G. et A. de Mortillet affirmaient une datation à l'âge du Fer des modèles non fonctionnels de taille moyenne et miniature, les haches fonctionnelles du type de Brandivy restant attribuées au Bronze final. Mais c'est le point de vue de J. Déchelette qui l'emporta jusqu'à la fin du xxe siècle : ces haches étaient attribuée à l'horizon de l'épée en langue de carpe du Bronze final atlantique 3 (BF IIIb = LBA 3 britannique = Ha B2-3, env. 950 à 800 av. J.-C.), avec une perduration au cours du premier âge du Fer reconnue par J. Briard. Bien qu'il commençât à être remis en cause à la fin du xxe siècle, ce point de vue traditionnel persiste chez certains auteurs. Aussi, le présent article se propose-t-il de produire un dossier aussi complet que possible de la question.
Les éléments démontrant une production de ces haches au premier âge du Fer seulement sont indiscutables : sur le continent, aucune ne peut être datée antérieurement à la phase récente du premier âge du Fer (Ha D). L'actuelle « présence » de rares haches dans certains dépôts du BFa 3 s'explique par leur pollution par des objets d'autres provenances, conséquences des aléas de leur conservation dans les collections ou les musées (par ex. : Plounéour-Lanvern, l'Île Verte, Aurigny). Parfois, quelques rassemblements d'objets aux provenances mal ou pas documentées réunis artificiellement ont été présentés comme des dépôts, lesquels n'avaient jamais existés (par ex. : Césarin). Dans d'autres cas, il s'agit d'une mélecture des sources documentaires (par ex. : Louvigné-du-Désert). Fait acquis essentiel, aucun dépôt de l'horizon de l???épée en langue de carpe, même parmi les plus volumineux (par ex. : Vénat, Jardin des Plantes, Prairie de Mauve, Belle-Île), lorsqu???il est documenté de façon indiscutable, ne contient de hache à douille de type armoricain, aucune découverte récente non plus.
Des prototypes des haches à douille de type armoricain abondaient dans les dépôts du Bronze final atlantique 3, dont quelques haches ornées de nervures verticales d'origine britannique ou apparentées pouvant annoncer celles du type de Brandivy et plus généralement, avec leurs décors de baguettes verticales, les autres modèles de haches à douille de type armoricain. Surtout, les haches du type du Plainseau préfigureraient celles du type du Tréhou et des types proches de Dahouët et de Plurien. Au début du premier âge du Fer, des haches font effectivement figures d'intermédiaires entre celles du type du Plainseau et celles de la famille Tréhou-Dahouët-Plurien (dépôt du Fossé Creuzette à Verberie). Les haches de petite taille des types de Maure, Saint-James et Couville, en revanche, ne possèdent pas de prototypes dans les dépôts de la fin de l'âge du Bronze. Il pourrait s'agir d'une production récente, la fin d'un processus d'évolution conduisant aux formes les moins fonctionnelles, que le fait de ne pas connaître leur finalité exacte peut nous faire considérer, au même titre que celles en plomb presque pur, comme les plus aberrantes de toutes.
S'il est désormais acquis que la production des haches à douille de type armoricain n'avait pas encore commencé pendant le Bronze final, la question du début de leur fabrication reste incertaine : leur visibilité en Gaule se limite au Ha D. Que cette production ait pu débuter dès l'étape ancienne du premier âge du Fer (Ha C) ne demeure, en l'état actuel de l'information, qu'hypothèse, comme aussi d'ailleurs une fin de production ou du moins de dépôt au début du second. La multiplication des dépôts de ces haches est surtout une des manifestations du phénomène général de reprise en Gaule des enfouissements de dépôts de métal au cours du Ha D, au même titre que, par exemple, les dépôts launaciens du Midi ou ceux de parures du Centre-Ouest et de la Loire moyenne.
Armorican-type socketed axes, particularly numerous in Brittany and Normandy, have been the subject of debate on both their purpose and their date since the 18th century. At the end of the 19th century, G. and A. de Mortillet claimed an Iron Age attribution for some medium-sized and miniature non-functional versions, whereas the Brandivy-type functional axes were still dated to the Late Bronze Age. It was however J. Déchelette???s point of view, confirmed by J. Briard in his famous book Les dépôts bretons et l???âge du Bronze atlantique published in Rennes in 1965, which prevailed until the end of the 20th century: these axes were attributed to the carp???s tongue sword horizon from the Late Atlantic Bronze Age 3 (i.e. BF IIIb = British LBA 3 = HaB2-3, around 950-800 BC). Even though J. Briard favoured a production of these axes mostly during the end of the Bronze Age, he also demonstrated that this production continued during the First Iron Age. This traditional point of view of a mostly Late Bronze Age production began to be questioned at the end of the 20th century, even by J. Briard himself, but nevertheless it still persists among some authors. The purpose of this article is thus to produce as comprehensive a file as possible on this issue.
The elements testifying to a production of these axes exclusively during the Early Iron Age are indisputable: on mainland Europe, no axe can today be dated for certain prior to HaD. The rare axes currently appearing in some Late Bronze Age 3 hoards can be explained by the ???pollution??? of these hoards with objects from other origins, as a consequence of hazardous conservation conditions in collections or museums (for instance Plounéour-Lanvern and l???Île Verte, Finistère; Durtal, Maine-et-Loire; Longy-Common, Aurigny). Sometimes, objects from non- or poorly-documented origins have been artificially brought together and presented as hoards, although the latter never existed (for instance Césarin, Corrèze). In other cases, there may be a misinterpretation of the documentary sources (e.g. Louvigné-du-Désert, Ille-et-Vilaine). It is a crucial established fact that no hoard from the carp???s tongue sword horizon among those formerly discovered and indisputably documented, even the largest ones (for instance Vénat, Jardin des Plantes, Prairie de Mauve), has ever yielded an Armorican-type socketed axe. The same applies to all the hoards discovered during the second half of the 20th century and the beginning of the 21st (for instance Gouesnac???h, Finistère; Belle-Ile-en-Mer, Morbihan; Saint-Père-en-Retz, Loire-Atlantique; Challans, Vendée; Meschers, Charente-Maritime; Triou, Deux-Sèvres). Consequently, if these axes had already been produced in their thousands by this period, it seems absurd they should never appear in hoards, either complete or as fragments.
Prototypes of Armorican-type socketed axes were abundant in hoards from the Late Atlantic Bronze Age 3: a few short axes decorated with vertical ribs, of British origin or related to them, could herald the Brandivy-type axes, or more generally the other patterns of Armorican-type socketed axes decorated with vertical ribs. Above all, axes of the Plainseau type would seem to prefigure those of the Tréhou type and types close to the Dahouët and Plurien variants. At the beginning of the Early Iron Age, some axes do indeed appear as intermediate forms between the Plainseau type and the Tréhou/Dahouët/Plurien Armorican type (Fossé-Creuzette hoard in Verberie). On the contrary, the small axes from Maure, Saint-James and Couville, as well as those made of almost pure lead, have no prototypes in Late Bronze Age hoards. They could represent a recent production of Armorican-type socketed axes, in other words the end of an evolutionary process leading to the least functional forms, which, due to our ignorance of their real purpose, we might consider the most aberrant of all.
Undoubtedly, the production of Armorican-type socketed axes had not yet begun during the Late Bronze Age. Nevertheless, the question of their actual beginning remains uncertain: in Gaul, they all date from HaD. Whether their production could have begun as early as the Early Iron Age (HaC) remains a mere hypothesis given our current state of knowledge, despite a few associations with axes of the Sompting type in the British Isles, or in Brittany in the Hengoat hoard (Côtes-d???Armor): the production of Sompting-type axes goes beyond the HaC Lynn Fawr horizon.
The increasing number of hoards of Armorican-type socketed axes is above all one manifestation of a global phenomenon occurring in Gaul during the middle and late phases of the Early Iron Age (HaD): a revival of the burying of metal hoards, similar for instance to the hoards from the Launac horizon in the South of France, or the ornament hoards in the Centre-West and Middle Loire areas (translation E. Thauvin-Boulestin).
Depuis la fin du XIXe siècle, les fouilles clandestines ou académiques ont mis au jour un grand nombre de pièces ou fragments de « feuilles de laurier » et de « feuilles de saule » provenant pour la plupart des grottes Rochefort, la Chèvre, la Dérouine, Margot et le Plessis, principales cavités de la vallée de l'Erve (Mayenne). Seule une partie de ces pièces a déjà fait l'objet d'études proposant des tentatives de reconstitutions chronologiques et typologiques. La reprise des fouilles depuis 2006 dans la grotte Rochefort et un nouveau regard sur les collections anciennes permettent aujourd'hui de redéfinir le Solutréen de la vallée de l'Erve, notamment par la multidisciplinarité des interventions et l'apport de datations 14C cohérentes. Au sein d'un assemblage lithique de près de 2'000 artefacts découvert en périphérie de l'occupation solutréenne, soixante et onze pièces foliacées de la grotte Rochefort sont ici étudiées.
La composante lithique de la grotte Rochefort fait état de nombreuses pièces cassées mais aussi de plusieurs pièces entières de belle facture, dont de grandes lames. Le corpus se caractérise aussi par des éclats et déchets de façonnage montrant que des activités de taille se sont bien déroulées dans la cavité elle-même. Les matériaux siliceux exploités par les Solutréens sont ici majoritairement des grès lustrés dont les sources les plus proches se situent à 30 km au nord de la grotte, silex, meulière et cristal de roche étant présents dans de moindres proportions. Au-delà d???un outillage commun de belle qualité, les pièces diagnostiques que sont les « feuilles de laurier » et les « feuilles de saule » témoignent des gestes et des choix techniques des tailleurs solutréens mais posent également la question de la finalité de ces objets. Toutes de petites dimensions, ces pièces foliacées relèvent-elles d'un choix culturel ou d'une contrainte économique telle une pénurie de matière première incitant les tailleurs à procéder au raffûtage systématique de leurs outils.
La série fait ensuite l'objet de comparaisons typo-technologiques avec des « feuilles de laurier » provenant d'une collection ancienne du porche de la Dérouine qui, si elle souffre évidemment des lacunes relatives aux modalités des fouilles et des inévitables tris opérés au XIXe siècle, témoigne d'un échantillon sensiblement identique en nombre. Distantes d'à peine 300 m l'une de l'autre, les deux cavités de Rochefort et de la Dérouine recèlent pourtant des ensembles fort différents. S'opposent ainsi le choix des matériaux mis en oeuvre par les Solutréens, à dominante de grès lustré et meulière dans la première et de silex dans la seconde, mais également la morphologie des « feuilles de laurier », les types de supports utilisés, les stades d'abandon, etc. Il découle de ces observations la question de la synchronie ou du statut de ces deux sites, pourtant clairement apparentés au Solutréen moyen à « feuille de laurier », c'est-à-dire sans pointes à face plane ni pointes à cran, vers 19500 BP.
Mots-clés : Solutréen moyen, « feuille de laurier », « feuille de saule », typo-technologie lithique, grotte Rochefort, grotte de la Dérouine.
Abstract: Since the end of the 19th century, clandestine or academic excavations have brought to light a huge number of laurel and willow-leaf pieces or fragments, most of them coming from the Rochefort, La Chèvre, La Dérouine, Margot and Le Plessis caves, which are the main cavities along the Erve valley (Mayenne, France). Only a part of these pieces has been studied with attempts at chronological and typological reconstitutions being submitted. Since 2006, new excavations in Grotte Rochefort and a new study of the earlier collections allow us today to redefine the Solutrean era in the Erve valley, in particular thanks to the multidisciplinarity of the interventions and the contribution of coherent 14C dates. The excavations of the Solutrean layer in Grotte Rochefort enabled us to unearth a lithic assemblage of approximately 2,000 artefacts. These materials were found in the narrowest and lowest part of the cavity. This observation, associated with the barely coherent spatial distribution, raises the issue of the nature of the occupation of this area of the cave, which we tend to call a rejection zone. The corpus is mainly made up of broken pieces and, except for a few beautiful complete blades, the collection is above all characterized by a high rate of fragmentation.
Seventy-one leaf-shaped pieces belonging to this lithic assemblage from Grotte Rochefort are studied here. The presence of numerous spalls corresponding to the production of bifacial pieces is an important characteristic of this corpus, showing that knapping activities did take place inside the cavity itself. The siliceous materials used by Solutrean people here are mainly silicified sandstones ('grès lustrés'), the closest deposits of which are located 30 km (approx. 18.6 miles) north of the cave. Above and beyond being part of a common good-quality toolkit, the laurel-leaves and willow-leaves - both 'type fossils' - are an illustration of the gestures and technical choices of the Solutrean knappers, but also raise the question of the purpose of these objects. All of them were small leaf-shaped pieces. Does this mean that they were the result of a cultural choice or of an economical constraint, such as a shortage of raw material forcing the knappers to proceed with the systematic resharpening of their tools?
The series is then compared - in terms of typo-technology - with other laurel-leaves from an earlier collection of the porch area of Grotte de la Dérouine. The Rochefort and Dérouine caves are only 300 m (approx. 328 yards) apart, yet they have yielded very different assemblages. Thus, both are opposed in terms of the choice of raw materials (the Solutreans predominantly chose silicified sandstone and millstone in the former - Rochefort - and flint in the latter - Dérouine) but also regarding the morphology of the laurel-leaves, the kind of supports they used, the abandonment phases, etc. The question of the synchrony and/or of the status of both sites stems from these observations, although each of them is clearly related to the laurel-leaf Middle Solutrean, a period characterized by the absence of flat-sided points or notched points, circa 19500 BP.
The items collected from the recent excavations, along with their reliable chrono-stratigraphic context and the gathering of the whole lithic assemblage (including flakes and micro-debris through sifting) enable us today to better analyse the operating processes used by the Solutrean knappers to produce their tools.
We thus tried to identify which products were favoured by knappers for the making of laurel-leaves. Though some bigger shaping flakes may have been chosen, the main supports are wide blades. Their characteristic is their average and somewhat standardized dimensions, with a 30+ mm width and a thickness varying from 4 to 10 mm. This leads us to suspect that these supports were predetermined because their width is obtained after setting in place several arrises in order to flatten the core's curve before extracting the blade. The butts of the striking platforms of these supports are wide ribs which were strongly abraded. So far we do not have any complete support, but the discovery of portions of irregular or uneven wide blades indicates that only the parts corresponding to the standards of the desired points or leaves were transformed.
The early collection from the porch of Grotte de la Dérouine is obviously characterized by the gaps due to the way in which the excavations were conducted and by the inevitable sorting carried out in the 19th century; the research in Grotte Rochefort remains partial and is probably only related to a rejection zone. This being stated, the validity of the corpuses and results presented could be contested. However, with a total number of laurel-leaves that is almost identical and sufficiently important for each site (46/56), the first elements of diagnosis and the comparisons do show real differences. Other than the choice of their materials, the technological criteria put forward to try to explain these observations point to that of the supports selected by the knappers to create their leaf-shaped pieces: mainly flakes and blades in Grotte Rochefort and, rather, central masses of raw material in Grotte de la Dérouine. Also, although preforms and complete pieces are more numerous on this latter site, we do not find there - as is the case in Grotte Rochefort - any final products, nor any sharpening pieces or laurel-leaf reworkings. On a typological note, the large and medium-sized modules of the leaves from Grotte de la Dérouine seem very different from the small pieces from Grotte Rochefort. Finally, and possibly isolated from any functional purpose, the former site's pieces are characterized by a noticeable proportion of asymmetrical leaves, which is a criteria that is not to be found in Grotte Rochefort.
This article is a first attempt at tackling the subject of leaf-shaped pieces from the site, based on the results of techno-typological analyses, and studied according to functional questions, finally raising the issue of the status of the said occupations.
Keywords: Middle Solutrean, laurel leaf, willow leaf, lithic typo-technology, Grotte Rochefort cave, Grotte de la Dérouine.
Découvert dans le cadre d'une prospection thématique sur les sites de plein air, le gisement de Peyre Blanque est un des rares exemples d'occupation à l'air libre du Magdalénien dans les Pyrénées. Nonobstant sa localisation au sommet d'une crête, le site apparaît remarquablement bien conservé, à l'exception toutefois des vestiges organiques en raison de l'acidité du sol. Estimé à plusieurs centaines de mètres carrés, le gisement a livré une industrie lithique variée et résolument originale dans le cadre pyrénéen, marquée notamment par l'association de débitages lamellaires de types carénés avec de nombreux triangles scalènes, le tout accompagnant un fonds commun plus typique du Magdalénien régional. Sur la base de comparaisons typotechnologiques surtout avec des gisements lointains (Sud-Ouest de la France et Espagne), cette industrie est rapportée à une phase plutôt ancienne du Magdalénien moyen, peut-être centrée sur le XIXe millénaire BP en chronologie calibrée, et inconnue jusqu'alors dans les Pyrénées centrales. D'un point de vue fonctionnel, le site est interprété comme un lieu d'activités multiples et organisées spatialement. On peut notamment citer la production d'équipements lithiques, par le biais de chaînes opératoires lamino-lamellaires distinctes et un débitage autonome d'éclats, ainsi que le travail des peaux fraîches, déduit de la présence d'un nombre singulier de racloirs et de larges éclats plus ou moins retouchés. Le site fut également un rare lieu de collecte et de traitement des colorants naturels, lesquels comptent à ce jour plusieurs centaines d'échantillons de composition et coloration très variées. Sans doute associée à cette activité, on trouve en particulier une enclume dont le contour naturellement zoomorphe a été probablement accentué. Par ailleurs, un aménagement de l'espace à vocation vraisemblablement domestique a été mis au jour, lui-aussi visiblement bien conservé, et dont les dimensions et la complexité architecturale sont tout à fait remarquables à l'échelle du Paléolithique supérieur européen. Cet article se veut être une présentation générale du site, mettant en particulier l'accent sur l'assemblage lithique.
Mots-clés : Pyrénées, Paléolithique supérieur, Magdalénien, site de plein air, industries lithiques, structure d'habitat.
Abstract: Peyre Blanque is an important newly-discovered open-air site in the foothills of the French Central Pyrenees (Ariège), which is described in this article. It was discovered in 2006 within the framework of a long-term open-air survey project, although it is not located in one of the hundreds of ploughed fields that have now been surveyed. These fields have yielded thousands of Palaeolithic artefacts, attesting to a much greater presence of prehistoric peoples in this region than the previous cave excavations might have indicated. Peyre Blanque is instead located on the crest of a sandy limestone ridge where the archaeological deposits have been well-preserved within the structural geological setting. That is, an underlying set of carbonate-cemented sandstone/limestone bars have apparently trapped the archaeological materials, preventing downslope erosion despite being at about 505 metres on the top of the ridge. Beginning with an evaluative season in 2007, seven field seasons of excavation have been undertaken leading to an exposure (to date) of over 80 square metres, with an extent of archaeological deposits along the ridge that is likely to be around 1500 square metres.
Stratigraphically, the archaeological materials lie in the upper soil horizons of a deeply-weathered carbonate-cemented sandstone. The archaeological level lies about 25-40 cm below the current surface, though taphonomic processes have led to the presence of some archaeological materials throughout the A horizon. Bioturbation, largely through worms and other burrowing organisms, led to artefacts left on the surface in prehistory becoming buried today. Organic preservation is almost non-existent, at least so far, but more than 11,000 chert artefacts have been recovered. These include large nuclei, smaller laminar cores, and an assemblage across the site dominated by flakes (83%) knapped primarily from a local novaculite chert derived from a source about 300 metres downslope. There is much evidence for in situ knapping activities and, unlike assemblages from the regional cave and shelter sites, the full chaîne opératoire is in evidence at Peyre Blanque. However, the assemblage also comprises a variety of raw materials, including some that originate from about 10 km away, as well as from sources that are up to 150 km to the west and from Dordogne sources 250 km to the north. The details of the assemblage, which is notably original in its composition, are a primary focus of this article. Typo-technologically, this assemblage cannot be understood within the framework of the regional Magdalenian as known to date. Rather, the presence of scalene triangles and carinated scrapers in particular evoke resemblances to dated assemblages from both the Languedoc and also the Cantabrian regions, and shows the closest affinity to what might best be described as an early Middle Magdalenian.
The chronometric dates obtained so far are from single-grain Optically-Stimulated Luminescence (OSL) analyses. Due to bioturbation, the dates returned vary by thousands of years. Radiocarbon dating has not been successful, though it could be attempted in the future if suitable material is recovered from a reliable context. Despite the presence of charcoal throughout the site, most of it has been dispersed and contaminated, perhaps by standing water, which is quite apparent in the sediment history, and/or other processes, and much of it is probably the result of both prehistoric and historically-known burning events. Besides being a unique open-air site in the region, especially for its preservation and that it is being excavated with contemporary methods and techniques, Peyre Blanque is yielding at least two other remarkable materials. First, nearly 150 different pieces of varied pigments, ranging from oranges, reds, blacks, and even a purple, have been recovered, and are being analysed for compositional characteristics. These are primarily various forms of manganese and haematite, some of which bear use traces. In addition, some pigment-processing stones in quartzite were imported to the site and used there. The pigment analyses are part of a comparative study of Peyre Blanque pigments with those on the cave wall of the nearby (12 km distant) site of Marsoulas, with which other affinities are of note. Secondly, the past few excavation seasons have revealed a construction of stones which, although it is not yet fully excavated, so far extends at least nine metres east???west oriented roughly parallel to the crest of the ridge. This appears to be comprised of more than one construction event and feature, and is made from a variety of sandstone and limestone blocks, but it adds a very different form to our more global understanding of Magdalenian 'built environments'since it is not a pavement, has no readily-identifiable hearth structures, nor does it appear to have circular 'hut' structures. More than 1000 artefacts have been recovered to date from this structure area; as an assemblage they are consistent with the types of lithics recovered from elsewhere across the site. With excavations in three major areas of the site (designated Western, Central and Eastern), there are spatial differences (with the stone structure characterizing the eastern area), but also consistencies in the predominance of flakes (>80%), the more-or-less equal proportion of blades and bladelets, the presence of a variety of cores (ranging from notably large ones to bladelet cores), and the near-exclusive spatial distribution of burins and scrapers, suggesting that the area with the scrapers most likely attests to hide working.
Keywords: Pyrenees, Upper Paleolithic, Magdalenian, open-air site, lithic industries, stone feature.
Longtemps réservées au riche patrimoine mégalithique régional, les recherches sur le Néolithique en Bretagne s'orientent peu à peu vers l'étude des traces d'habitat grâce notamment au développement de l'archéologie préventive. Ce constat se vérifie tout particulièrement pour l'habitat du Néolithique ancien, révélé pour la première fois en 1996 lors d'une opération d'envergure dans la région de Fougères. Découverts une dizaine d'années plus tard, les vestiges de Kervouyec, bien que fragmentaires, mettent en évidence une néolithisation de la péninsule jusqu'aux limites occidentales dès le début du Ve millénaire. En préalable à la réalisation du contournement routier au nord de l'agglomération de Quimper, un petit ensemble de vestiges comprenant deux fosses et quelques trous de poteau a été mis au jour et fouillé en 2005 à mi-pente d'une colline sur le versant exposé au sud-ouest et dominant la vallée du Steïr. En 2010, un projet de zone d'aménagement est à l'origine de la découverte d'une troisième fosse similaire aux précédentes à quelques centaines de mètres vers l'est. Dans un relief vallonné, le choix d'une topographie particulière sur une petite plate-forme limoneuse favorable à la construction a prévalu à ces implantations. Par leur morphologie et leur contenant, les fosses révèlent une exploitation du sous-sol pour être ensuite progressivement comblées de rejets. Les contours irréguliers des fosses avec une dissymétrie du profil et leur faible profondeur caractérisent l'extraction de matériau limoneux et malléable jusqu'au socle rocheux et rappellent les fosses latérales des maisons du Néolithique ancien. La conservation de quelques trous de poteau à proximité et les rejets de matériels divers confirment la nature domestique de ces structures. Le matériel archéologique se rapporte au Néolithique ancien et plus particulièrement à la culture Villeneuve-Saint-Germain; quatre analyses par le radiocarbone confirment la datation dans le premier quart du Ve millénaire. La céramique est l'élément principal avec un minimum d'une trentaine d'individus déterminés à partir de plus de cinq cents tessons. L'analyse pétrographique révèle une fabrication locale pour l'essentiel. Quelques éléments d'importation se distinguent par l'utilisation d'argiles exogènes et l'introduction de la technique de la chamotte. Les caractères morphologiques et décoratifs formes sphériques et décor impressionné dominants, rare cordon appliqué, se rapportent à la phase moyenne ou au début de la phase récente du VSG. L'outillage est essentiellement façonné sur silex d???origines variées avec toutefois une légère préférence pour les ressources côtières locales. L'importation de matériaux à longue distance s'oriente vers le Centre-Ouest de la France. Malgré sa faiblesse numérique, la série lithique met en évidence le maintient d'un système technique complexe en conservant un débitage laminaire sur produits d'importation. La présence et la nature d'anneaux en schiste et de macro-outillage, ainsi que l'analyse anthracologique des charbons indiquent une bonne connaissance et exploitation des ressources locales.
Mots-clés : Bretagne ouest, Néolithique ancien, Villeneuve-Saint-Germain, habitat, céramique, lithique, parure, macro-outillage, anthracologie, pétrographie, datations 14C.
Abstract: Until fairly recently, study of the Neolithic in Brittany was principally dedicated to the megalithic monuments due to the numerous sites there. Gradually, research was oriented towards settlement remains, notably through the development of rescue archaeology in the 1980s. This is particularly the case for the Early Neolithic and, for the first time in 1996, an important excavation was carried out on a house dated to the beginning of the fifth millennium in Le Haut-Mée, near Fougères (north-eastern Brittany). A few years later, in 2004, a second site was excavated at Betton, near Rennes, and recently, in 2014, a third one in Lannion not far from the north-western coast. These main settlements are complemented by numerous deposits of archaeological artefacts located by field surveys. However, for the whole region, less than ten sites dating from the beginning of the Neolithic have been discovered and the remains of Quimper Kervouyec, despite their partial preservation, demonstrate that neolithisation had reached the most western point of the Breton peninsula by the early fifth millennium. Prior to work on a road to bypass the town of Quimper (south-western Brittany), a small group of archaeological remains comprising two pits and a few postholes was discovered and excavated in 2005. A few hundred metres further east, a third pit was discovered in 2010 before the development of an urban area. These remains were located on a hillside, facing south-west, overlooking the Steïr river. In this hilly landscape, some natural flat platforms were chosen by the first farmers. The soil is composed of fine clay useful for different functions (covering wooden walls, making pottery). The geological substratum is very complex here and associates various granites and metamorphic rocks used by the Neolithic people. Due to their morphology (shallow depth, irregular contours, silty texture of the substratum) and their contents, the three pits discovered can be interpreted as having been dug for clay extraction and then progressively filled up with domestic waste material. Their contours are irregular and the asymmetrical section shows the direction of the extraction of the clay; their depth is shallow and extraction stopped when the granite bedrock was reached. These excavations are similar to the lateral pits of houses in Early Neolithic hamlets. The preservation of a few postholes nearby and the type of waste found confirm the domestic nature of these structures. The archaeological material, quite abundant despite the small volume of remains preserved, is characteristic of the Early Neolithic and the Villeneuve-Saint-Germain culture. Four radiocarbon analyses, two of which were made on calcinated ceramic material, confirm the dating of the site to the first quarter of the fifth millennium. Pottery represents the principal component with around thirty pots identified from over five hundred potsherds. Petrographic analysis of the components reveals a local manufacture for most of the pottery. However, some rare pieces imported from beyond the Armorican massif are distinguished by the use of exogenous clay and the introduction of the 'chamotte' technique. The morphological and decorative characteristics indicate a middle phase or the beginning of a recent phase of the Villeneuve-Saint-Germain culture. Spherical shapes and impressed decors are predominant, the applied cord typical of the recent phase almost absent. The lithic industry is mostly manufactured on flint of various origins with however a small preference for local and coastal resources. Long-distance importations came from central and western France. In spite of the small number of pieces, the lithic series indicates the maintaining of blade production on imported flint by means of a complex technical system. The presence and the nature of broken schist bracelets, typical artefacts of this culture, and the macro-tools mostly made on granite, reveal the Neolithic population???s good knowledge of their environment. The functional diversity of the macro-tools found on the site reveals that both domestic and craft activities were carried out, a characteristic of Neolithic settlements. The anthracological study of the charcoal highlights a progressive exploitation of the local forest, on the hill slopes and the bottom of surrounding valleys. Wood selection with oak dominant is typical of Early Neolithic sites.
These settlement remains represent at present the most western traces of neolithisation in the Armorican Peninsula at the beginning of the fifth millennium, in addition to the few regional excavated sites. Detailed analysis of the archaeological artefacts ??? ceramics, lithics, stone bracelets, macro-tools, anthracology, petrography ??? reveals both local supply and long-distance relationships, in particular with the Loire valley and Touraine.
Keywords: West Brittany, Early Neolithic, VSG Culture, dwelling, ceramics, lithic, stone bracelets, macro-tools, anthracology, petrography, radiocarbon dates.
La découverte de la mine de silex d'Espins « Foupendant » permet de questionner des comportements socio-économiques qui caractérisent la néolithisation de l'Ouest de la France, à travers l???exploitation du silex du Cinglais. Ce matériau est présent sous forme laminaire sur la majorité des sites du Rubané, Villeneuve-Saint-Germain et Cerny ancien, surtout en Basse-Normandie et en Bretagne. La découverte d'Espins permet de caractériser pour la première fois l'origine géographique et géologique précise du silex du Cinglais, et les premières phases de son exploitation.
Espins est situé au sud de la plaine de Caen, dans le territoire du Cinglais, à l'interface entre les plaines jurassiques bas-normandes et le Massif armoricain. Il s'agit d'une des rares sources de silex de bonne qualité proches du vaste territoire armoricain qui en est dépourvu. Ce silex a été exploité exclusivement pour la production de lames détachées par percussion indirecte, alimentant la plupart des habitats de l'Ouest. Le plateau du Cinglais est caractérisé par des argiles à silex riches en rognons de bonne qualité. Les trente-trois puits d'extraction découverts lors des sondages témoignent de leur exploitation. Les déchets de débitage laminaire ont été découverts sur l'ensemble du plateau, autour des puits et dans leur remplissage. Ils sont caractéristiques d'un site de production : leur abondance contraste fortement avec le net déficit en produits recherchés, systématiquement prélevés. Leur répartition en surface dessine les contours d'un vaste complexe minier (environ 30 ha). Les lames produites sont courtes (entre 7 et 12 cm de long) et n'ont pas été transformées ni utilisées sur place. Aucun indice d'occupation domestique n'a été observé (céramique, parure, outillage domestique) sur la minière ou à proximité. La production laminaire est semblable à celle des contextes Rubanés et Blicquy/Villeneuve-Saint-Germain dans le Bassin parisien et en Belgique. L'attribution chronoculturelle du site d'Espins se fonde sur cette similitude et sur deux datations 14C qui ciblent l'intervalle 5000-4750 av. J.-C. La minière s'intègre donc au système technique du Néolithique de tradition danubienne documenté sur une grande partie de l'Europe du Nord-Ouest. Il s'agit d'un des rares sites d'extraction de silex connus dans cette aire chronoculturelle, depuis les découvertes réalisées en Europe centrale. Sur les sites d'habitat, l'homogénéité des productions en silex du Cinglais est remarquable, qu'il s'agisse de ceux de Bretagne ou de Basse-Normandie. Le silex est toujours acheminé sous la forme de blocs préparés ou de lames brutes, qui sont aménagées, puis retransformées sur place. Ces sites ne sont pas re-distributeurs. La distance d'approvisionnement ne modifie pas fondamentalement le comportement des Néolithiques vis-à-vis du matériau. La chaîne opératoire laminaire, invariable en Europe occidentale durant des siècles, est régie par des contraintes qui mettent en jeu des savoir-faire. Dès lors, on peut supposer un contrôle de ces savoir-faire et de leur transmission, mais aussi des ressources lithiques en elles-mêmes et de l'extraction. Un tel contrôle peut avoir une forte incidence sur les modes de diffusion du silex du Cinglais. Ici, l'hypothèse de tailleurs itinérants s'impose, notamment en raison de la présence des déchets de taille présents sur les sites bretons et des différences de savoir-faire qui y sont perçues entre les industries sur silex du Cinglais et les productions locales. Les tailleurs seraient les garants d'un savoir-faire technique qui expliquerait l'homogénéité de ces industries, sur toute leur aire de répartition et sur toute la durée du Néolithique ancien. Une telle constance dans l'approvisionnement et la gestion des industries laminaires, quelle que soit la distance à l'affleurement, montre en tous cas le dynamisme du modèle d'exploitation des roches à cette époque.
Mots-clefs : Néolithique, Nord-Ouest de la France, Normandie, système technique, chaîne opératoire, mines de silex, silex jurassique, technologie, outils en silex, lames.
Abstract: The discovery of the flint mine at Espins "Foupendant"allows us to examine, through the exploitation of Cinglais flint, the socio-economic behaviour characteristic of the Neolithic in the west of France. This material is present in laminar form on the majority of LBK, Villeneuve-Saint-Germain and early Cerny sites, particularly in Normandy and Brittany. Its use is documented by a corpus of 45 excavated sites and 63 surface sites. The discovery at Espins allows the precise geographical and geological origin of Cinglais flint, and the early stages of its processing, to be determined for the first time.
Espins is located in the south of the Caen plain, in the Cinglais territory, between the Jurassic Normandy plains and the Armorican Massif. It is one of the last sources of good quality flint at the western margin of the Paris Basin, before the extensive Armorican territories which lack good flint. This material was used exclusively for the production of blades obtained by indirect percussion, supports distributed to most Western settlements. Not far from Espins, the flint mine of Soumont-Saint-Quentin (Calvados) "Les Longrais" was discovered at the same time. It provides comparison and reinforces the systematic nature of this exploitation.
The Cinglais territory is characterized by flint clays under a silt layer, containing flint nodules. The 33 extraction pits discovered during surveys bear witness to their exploitation. Large quantities of technical flakes from the laminar chaîne opératoire were discovered over the whole plateau, and around the pits or in their fill.
They are characteristic of a production site. This abundance of technical flakes is in strong contrast to the deficit of desired products (blades), which were systematically collected. Their surface distribution defines the outline of a large mining complex (about 30 hectares). The blades produced are short (between 7 and 12 cm long) and were not processed or used locally. The few tools discovered inside the pits are made of flint: these tools are specialized for use in a mining context. No evidence of domestic occupation (ceramics, stone bracelets, household equipment) was observed in the mines or nearby.
The blade production is similar to that of the LBK and Blicquy/Villeneuve-Saint-Germain contexts in the Paris Basin and Belgium. The chronocultural attribution for the Espins site is based on this similarity and on two radiocarbon dates that target a range between 5000 and 4750 BC. This mining site is thus integrated into the technical system of the Danubian Neolithic tradition, documented in a large part of north-western Europe. Espins «Foupendant» is one of the few flint mining sites known in this chronocultural sphere since the discoveries made in Central Europe.
On dwelling sites, in the regional dissemination area (less than 25 km), Cinglais flint is the main material used for tools, transported in the form of prepared cores or raw blades. Tools corresponding to typological standards are mainly made on Cinglais flint blades. Alongside them, some expedient flake tools were always made on local flint, regardless of its quality. Technological flakes show that blades could sometimes be made in the settlements, but in no case is it possible to prove any excess production. Cores are very rare, unlike on the workshop or mine sites.
In the extra-regional dissemination area (over 25 km, mainly in Brittany), Cinglais flint is an important part of the assemblage, despite supply distances that may exceed 100 km. In all cases, the Cinglais flint is characterized by exclusively laminar management, while local resources are used in the form of flakes. Cinglais flint is transported in the form of blades (raw or processed) or prepared cores. Laminar technological flakes are rare.
The composition of the Cinglais flint assemblages between Brittany and the Caen plain is not as different as it might be. For all these sites, flint is delivered in the form of prepared cores or raw blades, which are transformed and then reprocessed on site. These settlements are not re-distributors. In addition, the homogeneity of the laminar industries between the Jurassic plains and Brittany is remarkable: no operative difference was observed. This shows that the supply distance did not fundamentally alter the behaviour of the Neolithic populations regarding the raw material: its economy is similar in almost all habitats.
Sites in Brittany show the preference of these populations for Cinglais flint by the important quantities found, despite the geographical distance. This presumes a strong social demand that stimulated the extraction of raw material at the flint source: the needs arising from long-distance distribution encouraged the production site. Similarly, this social demand explains the permanence of this system in the long term, as suggested by the early Cerny examples.
The laminar chaîne opératoire, invariable in the sedimentary basins of western Europe for centuries, was governed by technical constraints (standardization and complexity of the flint knapping), socio-economic constraints (social demand), cultural constraints (production standards). All these constraints involved high-level skills. It is thus possible to talk about a real specialized production. We may then presume the blade production was controlled by an elite of some type, who could also control transmission of these skills and the lithic resources themselves, or the extraction process.
Such control could have had a strong impact on the dissemination modes of Cinglais flint. We can assume a regular traffic from east to west of persons and goods, which would encounter Western stimulants (ceramics, Armorican stones). Finally, the hypothesis of itinerant flint knappers can be preferred, particularly because of the presence of technical laminar flakes on sites in Brittany and differences perceived in expertise, away from the flint sources, between industries on Cinglais flint and local productions. Thus, itinerant flint knappers would keep their skills for themselves, which would explain the homogeneity of these industries throughout their distribution range and throughout the duration of the Early Neolithic. Whatever the case, such constancy in the supply and management of laminar industries, regardless of the distance from the flint source, demonstrates the dynamism generated by the chaîne opératoire of Cinglais flint at that time.
Keywords: Neolithic, north-western France, Normandy, technical system, chaîne opératoire, flint mines, Jurassic flint, technology, flint tools, blades.
L'intensification récente des travaux d'aménagement donnant lieu à des opérations d'archéologie préventive dans la plaine de Troyes (Aube) a entraîné une expansion remarquable du volume des données, contribuant à modifier nettement la vision que l'on pouvait avoir de l'occupation humaine ancienne. La densité et la richesse des sites de certaines périodes archéologiques jusqu'à présent inégalement documentées suscitent de nombreuses questions dépassant l'intérêt propre de chaque site. Ce renouvellement en profondeur de l'information touche particulièrement la fin de l'âge du Bronze et le premier âge du Fer. Le cour des données a trait au système d'habitat et à son évolution qui peut être considéré comme le principal indicateur utile à la compréhension, bien qu'indirecte, de la trame de peuplement ancienne.
Le travail d'analyse du système d'habitat, couplé aux données principales du système économique agropastoral, a été mené à deux échelles : d'une part à grande échelle, celle d'un groupe de terroirs, par le biais de la documentation des fouilles préventives menées sur le parc logistique de l'Aube (PLA), d'autre part, à plus petite échelle, celle de la plaine de Troyes, sur une zone de 15 km de rayon environ. Ce dialogue permet de détecter et de discuter des régularités ou des irrégularités dans la trame globale du système d'habitat et de proposer des scenarii locaux d'évolution.
L'assise du parc logistique de l'Aube, en termes de représentativité, fournit un socle de données solide. L'étendue spatiale de l'opération et les découvertes nombreuses se rapportant à ces périodes autorisent une vision quantifiée et plus seulement qualitative des rythmes d'occupation de l'habitat comme de l'évolution du système agraire. Certaines catégories de données telles que celles relatives à l'économie végétale ou animale, dont chaque phase a livré un nombre conséquent d'échantillons, peuvent être considérées comme représentatives non seulement au niveau du terroir étudié mais également à l'échelle de la Champagne méridionale. Du point de vue du système d'habitat, la courte expérience d'un regroupement de population (hameau ou village) à la fin de l'âge du Bronze tranche avec la trame courante de l'habitat dispersé protohistorique.
L'analyse conduit à distinguer six grandes phases dans l'évolution du système, que l'on retrouve à l'échelle du bassin de Troyes. Se dégagent également, à petite échelle, plusieurs pôles de densité forte qui pourraient signaler une structuration du territoire qui a disparu ultérieurement, pendant le second âge du Fer. L'économie agropastorale et son évolution sont aussi sollicitées en tant que principal indicateur de la vie économique et des capacités de reproduction des sociétés passées.
La discussion finale aborde quelques thèmes qu'il importera de préciser : sur la nature et la valeur du cycle économique identifié, sur la thèse du caractère fondamentalement dispersé du système d'habitat protohistorique et de sa résistance à l'urbanisation, ainsi que sur la résilience des sociétés agropastorales face aux changements climatiques globaux enregistrés à la fin de l'âge du Bronze et au premier âge du Fer.
Mots-clefs : âge du Bronze, premier âge du Fer, Aube, Troyes, paléoenvironnement, carpologie, archéozoologie.
Abstract: The recent intensification of construction work and resulting preventive archaeological excavations on the Troyes Plain (Aube, France) have produced a remarkable increase in the amount of data available, considerably modifying our vision of early human occupation there. For some previously poorly known archaeological periods the density of sites with abundant finds raises a number of questions that surpass the individual interest of each site. This major renewal of the available evidence particularly concerns the late Bronze Age and the Early Iron Age. Most data relate to settlements and their development, thus providing an important body of evidence for gaining a broader understanding, albeit indirect, of the whole pattern of settlement.
Analysis of the settlement system, coupled with the main data on the agricultural economy, was undertaken on two scales: on the large scale of a group of terroirs, using results of preventive excavations in the Parc Logistique de l???Aube (PLA), and on the smaller scale of the Troyes Plain, over a zone of about 15 km radius. This dialogue enables the regularities and irregularities in the overall settlement system to be detected and discussed, and local scenarios of change to be proposed.
The dataset from the Parc Logistique de l'Aube is sound and representative. The spatial extent of the project (250 hectares) and the numerous discoveries dated to these periods allow a quantified vision of both the tempo of site occupation and changes in the agrarian system. Study of the settlement system was based on 25.5 hectares of extensively excavated zones investigated between 2005 and 2008. These include 84 spatially and chronologically distinct occupation sites, defined on the basis of 437 reliably dated archaeological features. Three generic indicators of their main dimensions (surface area, number of features, storage feature volume) were recorded for these occupations and are presented in histogram form with a chronological resolution of 50 years. Certain categories of data such as those relating to the plant and animal economy, for which each phase produced a significant number of samples, can be considered representative not only at the terroir level but also on the scale of southern Champagne. As regards the settlement system, the short-lived episode of a clustering of population (hamlet or village) at the end of the Bronze Age contrasts with the standard pattern of scattered protohistoric dwellings.
The analysis shows six major phases in the development of the system and these are also visible throughout the Troyes basin: from ????2200 to ????1350, from ????1350 to ????950, from ????950 to ????750, from ????750 to ????620, from ????620 to ????450 and lastly from ????450 to ????250. On the smaller scale, several poles of high density stand out; they could indicate the emergence of a territorial structure that subsequently disappeared, during the later Iron Age. In addition, the agropastoral economy and its development provide evidence for the economic life and the capacities for reproduction of past societies. The dynamic nature of agriculture is attested by a large quantity of evidence, including a wide range of plants. The system is based on 15 cultivated species dominated by the production of cereals, with relatively few changes over time. While the range of crops and the economic importance of each plant show little variation, a change can be seen in the wild plants associated with the remains of the domestic species. This is an indication of changes in agricultural practices. The faunal evidence follows a rather different pattern, as data are abundant for the end of the Bronze Age and this is followed by a period between ????750 and ????550 with very few faunal remains. For the end of the Bronze Age, there are no special trends in consumption, herds are made up of the usual domestic triad and there are very few wild animal bones.
The final discussion addresses a number of open questions. What is the nature and value of the economic cycle identified through these quantitative variables? Can one go beyond the hypothesis of the fundamentally scattered nature of the protohistoric settlement system, as one observes a slow but irrepressible trend towards more long-term occupation through a reduction in mobility between generations? On a similar note, the presence of short-lived villages at the end of the Bronze Age provides additional evidence for considering the issue of possible social resistance to the constraints of urbanisation in continental Europe. Lastly, all these data also fuel the debate on the degree of resilience of protohistoric farming societies to the climate changes recorded for the end of the Bronze Age and the Early Iron Age.
Keywords: Bronze Age, Early Iron Age, Aube, Troyes, ancient environment, carpology, archaeozoology.
Les « couteaux de Kostienki » ont été identifiés au début du xxe siècle par Petr Efimenko (1915) un pionnier de l'archéologie paléolithique russe. Après un siècle de travaux autour de leur identification et leur caractérisation, ces outils sont aujourd'hui un des indices qui permettent, selon certains auteurs, de renforcer le consensus d'une civilisation gravettienne paneuropéenne. En effet, depuis leur première identification, ces objets ont depuis été prétendument reconnus sporadiquement à travers presque tout le continent, de la grande plaine Russe (Kostienki, Avdeevo, etc.) jusqu'à la France (Corbiac, grotte du Marronnier, abri du Blot, etc.), l'Allemagne (Mainz-Linsenberg) et l'Italie (grotte Paglicci) en passant par une grande partie de l'Europe centrale (Willendorf, Pavlov, Dolní V?stonice, Moravany nad Váhom, Kraków Spadzista, etc.). Logiquement, ces éléments de comparaisons ont renforcé les rapprochements entre ces univers géographiques très différents et sont venus s'ajouter à la liste des artefacts (comme les Vénus) ou des pratiques (phénomène des sépultures) étayant une vision paneuropéenne homogène (mais nuancée) du Gravettien. Si cette vision s'avère séduisante, nous pensons toutefois que les couteaux de Kostienki, tels qu'ils sont perçus par une grande partie de la communauté des préhistoriens, ne sont pas d'aussi bons éléments de rapprochement que ce que l'on imaginait initialement. A la faveur d'une rencontre entre spécialistes du Gravettien oriental et occidental, nous avons pu déceler des divergences profondes dans les critères de définition même des couteaux de Kostienki ou lames aménagées par technique de Kostienki. Dans cet article, nous rappelerons donc la longue et controversée histoire (de près d'un siècle) attachée à la définition de ces artefacts. Ensuite, après avoir exposé l'origine du malentendu qui permit leur identification en Europe de l'Ouest et détaillé notre propre implication dans cette erreur, nous proposons de faire le point sur la question en tentant de : 1) expliciter ce que sont les couteaux de Kostienki identifiés en Russie ; 2) montrer en quoi ils diffèrent des artefacts décrits comme tels en Europe occidentale ; 3) dépoussiérer les anciennes identifications de couteaux de Kostienki en Europe centrale. En anticipant quelque peu, nous pouvons déjà dire que dans le cas de l'Europe orientale, il s'agit bien d'outils (des couteaux) tandis que dans le cas de l'Europe occidentale, il s'agit d'une technique d'extraction lamellaire plutôt anecdotique s'insérant dans un schéma de production de supports. Nous souhaitons aussi réaffirmer que de simples convergences morphologiques d'outils ne devraient pas servir à défendre l???existence de corrélations entre des industries distantes de plus de mille kilomètres. Ace titre, nous fournissons d'ailleurs un bref aperçu de la diversité des contextes chronologiques et géographiques où ont été décrites (parfois sous le même nom) des pièces « similaires ». Quoiqu'il en soit, dans les contextes du Gravettien occidental où ces artefacts étaient censés être présents, nous avons constaté qu'il ne s'agissait en fait principalement que de convergences morphologiques quantitativement marginales. En effet, aucun des sites examinés pour l'instant n'a livré de vestiges permettant de penser que le procédé de ravivage de couteaux par technique de Kostienki était connu et employé dans cette partie occidentale du continent. Restent bien sûr quelques sites où la question se pose toujours et il faudra dans un avenir proche clarifier ce problème. Finalement, nos résultats mettent fin à un malentendu vieux de près de 40 ans qui s'est avéré dommageable à la compréhension du Gravettien à l'échelle européenne. Des analogies bien réelles entre Gravettien oriental et occidental peuvent évidemment exister, mais il ne nous paraît pas légitime de les étayer sur la base de la présence de « pseudo» couteaux de Kostienki en Europe de l'Ouest.
"Kostienki knives"(also named "CdK"in the text) were identified at the beginning of the 20th century by Petr Efimenko (1915), a pioneer of Russian Palaeolithic archaeology. After a century of work and investigations about the description and features of these artefacts, they have now become a major indication to support and strengthen the consensus of a pan-European Gravettian civilization. Indeed, since their very first identification, these tools have allegedly been recognized through almost all the Old World. They have been identified from the Great Russian plain (Kostienki, Avdeevo, etc.) to the south of France (Corbiac, Grotte du Marronier, Abri du Blot), Germany (Mainz-Linsenberg) and Italy (Grotte Paglicci). In addition, they have also been very frequently mentioned on Gravettian sites in Central Europe (e.g. Willendorf, Pavlov, Dolní V?stonice, Moravany nad Váhom, Kraków Spadzista). Logically, these elements of comparison were added to the list of artefacts (such as the anthropomorphic female figurines) or practices (burials) that support a homogenous vision (although with nuances) of the Gravettian as a pan-European ???culture???. Such a vision is quite attractive but we think that Kostienki knives, as understood by most specialists, may not be as good analogical elements as some may have first thought. Thanks to an encounter between Eastern and Western European Gravettian specialists (the authors of this article) we have been able to distinguish major differences in our definition criteria of what we all called ???Kostienki knives??? or ???Kostienki technique retouched blades???. In this article, we are first going to sum up a long century of the controversial history of the definition and recognition of these artefacts. Afterwards, we will explain the origin of the major misunderstanding that has led many prehistorian specialists (including one of us) to propose erroneous identifications of this type of artefact in Western Europe (starting with the site of Corbiac in Dordogne). In order to review the situation and point out the mistakes remaining in scientific literature we propose to: 1) explain what exactly were the original artefacts identified in Russia (proposing a definition based on typological, functional and technological analysis practiced on Zaraysk and Kostienki I sites); 2) show the major differences that exist between them and the other so-called "Kostienki knives"(or "Kostienki technique retouched blades") identified in Western Europe (reassessing the cases of Le Blot, Mainz-Linsenberg and Corbiac); 3) reassess the old identifications of "Kostienki knives" on various sites in Central Europe (work based on M. Polanská's ongoing PhD). On the basis of our study, we can already say that in the case of Eastern Europe (site of Zaraysk), "Kostienki knives"are real tools as proposed by Semenov in the 1960s and '70s. The huge variation seen in their morphology can be interpreted as the reflection of the different stages of implementation of a quite standardized cutting edge resharpening process. From a functional point of view, Kostienki knives (from Zaraysk or Kostienki I) seem to have been used to cut/plane (rarely carve) various materials (mostly meat, wood or hard organic materials and rarely minerals). On the contrary, in Western Europe (on the sites of Le Blot and Mainz-Linsenberg), the so-called "Kostienki knives"(or "Kostienki technique retouched blades") correspond to a marginal moment of the bladelet flaking process on prismatic burin cores. On the site of Corbiac, the reassessment of the material identified as "Lames aménagées par technique de Kostienki" by J. K. Kozlowski in the 1980s proves that the artefacts do not correspond to the "Kostienki knives" described in Russia. Finally the examination of different published artefacts or collections allows us to think that many identifications of so-called "Kostienki knives" in Central and Western Europe are questionable. Indeed it seems that a large part of these identifications have been based on a poor understanding of the Russian published literature and on a series of secondary misguided identifications outside Russia. Very often, the so-called "Kostienki-knives" have been recognized through a mere morphological convergence based on the single presence of an inverse truncation/platform (sometimes, but not systematically) used to make some "removals" on the dorsal surface. After all, many published and drawn specimens reveal that "Kostienki knives" have often been confused with simple inverse truncations, broken artefacts, atypical burins or even splintered pieces. We want to stress that mere morphological convergences between tools should not be used to support the hypothesis of some sort of "connection" between groups distant by more than a thousand kilometres. Speaking of convergences, we also provide a rapid review of diverse chronological and geographical contexts where some artefacts more or less similar to "Kostienki knives" have been described (sometimes with similar names). However, on several western Gravettian sites, we have seen they were only simple morphological convergences, usually quite rare and with a different functional purpose. So far, we think that no convincing example of a true series of "Kostienki knives" has been properly published in Western Europe. Unfortunately in some cases (e.g. Paglicci Cave), the question is still unresolved, mostly because the alleged presence of such artefacts is only briefly mentioned. Such cases will surely need to be reassessed carefully in the near future. Finally, our results close a 40 year-old misunderstanding about these tools and their alleged existence on the few Gravettian sites where they have supposedly been recognised in Western Europe. The re-examination of some collections in Central Europe has also proved that many old identifications in the area should be considered carefully and reassessed. True and reliable analogies may well exist between the Eastern and Western Gravettian, but the so-called "Kostienki knives" of Western Europe are not among them.
Le Roc de Marcamps (Prignac-et-Marcamps, Gironde) est un site du Magdalénien moyen connu notamment par la découverte de nombreuses navettes dans les fouilles anciennes du secteur 1. Les travaux menés par Michel Lenoir dans le secteur 2 durant les années 1980 n'ont pas livré ce type de marqueur osseux mais un ensemble de vestiges attribués également à cette période. Plusieurs dates radiocarbone raisonnées placent ce gisement autour de 18900-18600 cal. BP, soit lors des premiers temps du Magdalénien moyen. Cette phase de transition apparaît synchrone de l'événement climatique d'Heinrich 1 marquant une péjoration climatique avec des conditions froides et steppiques. Elle se caractérise en outre par d'importants changements techno-économiques ou symboliques. A l'interface des « faciès » à navettes, à pointes de Lussac-Angles ou à lamelles scalènes, le Roc de Marcamps 2, et plus largement la Gironde, occupe une place privilégiée pour la compréhension de la mosaïque géoculturelle structurant la genèse du Magdalénien moyen.
Dans le cadre d'une révision collective du gisement par des membres du projet « Magdatis », cet article présente une approche croisée, détaillant les analyses taphonomiques et archéozoologiques des restes de faune (ongulés, mésomammifères et avifaune) ainsi que les études typotechnologiques des industries lithique et osseuse et de la parure. La stratigraphie du Roc de Marcamps 2 comprend un ensemble supérieur mêlant dépôts récents, déblais de carrières, céramiques et vestiges paléolithiques brassés par des animaux fouisseurs. L'ensemble inférieur apparaît mieux conservé et renferme les vestiges magdaléniens. Les restes fauniques documentent une chasse principalement axée sur les bisons, les antilopes saïga, les chevaux et les rennes durant la mauvaise saison et au début de la bonne saison. L'exploitation de ces ressources animales est intensive et orientée vers la récupération de la moelle en complément de la viande. L'étude des matières premières siliceuses, préférentiellement d'origine locale, atteste toutefois un apport de silex de Saintonge (silex « grain-de-mil »). La production lithique est principalement composée de débitages lamellaires voués à la confection d'éléments d'armatures de chasse. Le débitage laminaire fournit des supports normalisés pour la fabrication d'outils. L'industrie en matières dures d'origine animale est assez pauvre et comprend un équipement en os (aiguilles, lissoirs, retouchoirs) et en bois de renne (essentiellement des armatures de projectile) ainsi que des éléments de parure sur coquillages (en majorité des dentales) et sur dents (en majorité des incisives de renne sciées).
L'étude typotechnologique des industries lithique et osseuse et de la parure suggère des rapprochements tant avec le « Magdalénien à navettes » qu'avec le « Magdalénien à pointes de Lussac-Angles », deux faciès dont le Roc de Marcamps 2 est contemporain. Ceci doit conduire à s'interroger sur la pertinence de l'utilisation de ces faciès pour définir des « cultures exclusives » qui finalement se recouvrent chronologiquement et géographiquement, notamment en Gironde.
Discovered in 1929 by P. David and G. Malvesin-Fabre, Roc de Marcamps (Prignac-et-Marcamps, Gironde) is known as a Middle Magdalenian site due, in particular, to the discovery of numerous antler shuttles in the old excavation of sector 1. The more recent work carried out in the 1980s by Michel Lenoir in sector 2, located a few meters below sector 1, did not yield this diagnostic osseous artefact-type specifically, but a set of other remains equally attributed to the same period. Six radiocarbon dates (of which four are new and until now unpublished) place the occupation of this site in the 18900-18600 cal. BP timeframe, i.e. at the very beginning of the Middle Magdalenian. This transition period seems to be synchronous with the Heinrich 1 climatic event, a period marked by climatic deterioration in which cold, steppe-like conditions existed. This period is characterized by major techno-economic and symbolic changes. Located at the crossroads of three ???facies??? of this period (the "shuttle","Lussac-Angles" and "scalene bladelets" facies), Roc de Marcamps 2 and, more generally, the Gironde region, occupies a privileged place for understanding the geocultural mosaic that influenced the formation of the Middle Magdalenian.
In the context of a site reassessment by members of the Magdatis project, this paper aims to examine multiple records, in particular taphonomic and archaeozoological analyses of faunal remains (ungulates, small mammals and birds), as well as techno-typological studies of lithic, osseous and ornament industries. The stratigraphy of Roc de Marcamps 2 includes an upper unit in which recent deposits, backdirt from former quarrying activities, ceramics, as well as Palaeolithic material are found, all mixed together as a result of the actions of burrowing animals. The lower unit seems to be better preserved and includes Magdalenian remains dispersed over a number of layers (2a, 2b, 2c and 3) identified during excavation in approximately 1 metre of deposits. Our work in digitizing the field notebooks as well as in creating projections of the artefacts in three dimensions did not reveal the reality of these subdivisions, however. In addition, the very similar 14C dates and the homogeneous lithic industry, all of which point to the beginning of the Middle Magdalenian, incited us to ignore these stratigraphic subdivisions for this overall site reevaluation and to consider instead layers 2 and 3 as one archaeological unit.
The faunal remains of RM2 are abundant and well preserved; they demonstrate that hunting was primarily aimed at bison, saiga antelope, horse and reindeer during the cold season and the beginning of the warm season. Carcass processing of these ungulates was intensive and oriented towards marrow extraction in addition to meat recovery, as demonstrated by numerous impact scars and cutmarks on the bones. By contrast, small mammals and birds were barely used by Magdalenian people on this site.
Lithic raw material was primarily obtained close to the site, within a 10 km radius (grey-black or blonde varieties of Senonian flint, Maastricht flint and Tertiary flint). Other varieties of flint attest to the use of more distant sources, such as ???grain-de-mil??? flint from Charente Maritime. A small number of artefacts demonstrate links with even more distant places such as Chalosse (Upper Maastricht flint with Lepidorbitoides sp. inclusions, from 200 km south of the site) and the Middle Cher Valley (Lower Thuronian formations, 250 km north of the site). Lithics are composed primarily of bladelet knapping intended as part of hunting tools, mainly simple backed bladelets, retouched bladelets and truncated bladelets. Blade knapping provided standardized blanks for the production of other tools, primarily burins and simple endscrapers, as well as some composite tools (burin-endscrapers).
The osseous industry is relatively poor. It includes bone tools comprised of needles, for which splinters were extracted using a groove and splinter technique. There are also smoothers obtained by bilateral longitudinal grooving; and retouchers whose shape and dimensions are quite standardized and whose impact scars are only minimally noticeable. The groove and splinter technique was also used to extract splinters from the main beam of large reindeer antlers. Most antler objects are projectile points, among which the only identified base is a single-bevelled type. Finally, ornaments are also present on this site. Shells, mainly Dentalium sp., were intentionally sectioned by the saw and snap technique. A good number of segments are clearly finished products, as seen by finishing traces on them (smoothing of edges by abrasion) and by usewear marks (partially blunt edges). The presence of complete unworked shells as well as segments probably come from manufacturing waste and suggest in situ production. Pierced teeth ornaments are less common; these are comprised of cut reindeer and hare incisors, one pierced fox canine as well as one horse incisor decorated with a grid pattern.
The techno-typological analysis of the lithic and osseous industries as well as of the personal ornaments point to affinities with both the "shuttle" facies (truncated-backed bladelets, shell and teeth personal ornaments) and the "Lussac-Angles" facies (truncated backed bladelets, smoothers, and decorated bone incisor), two Magdalenian facies with which Roc de Marcamps 2 is contemporaneous. This fact should cause us to reconsider the relevance of these facies in defining exclusive cultures which, in the end, overlap each other chronologically and geographically, notably in Gironde.
Si elles sont communes et même emblématiques dans le domaine de la Préhistoire, les fouilles dans les grottes ou abris-sous-roche sont très rares sur le Massif armoricain pour le Paléolithique final et le Mésolithique. Les travaux de terrain menés depuis 2007 dans certaines cavités du Finistère (Pont-Glas à Plounéour-Ménez, Kerbizien à Huelgoat et le Rocher de l'Impératrice à Plougastel-Daoulas) offrent un nouvel éclairage sur les manières d'habiter des espaces restreints. Une nouvelle étude est également proposée du mobilier de la seule grotte continentale de Bretagne, Roc'h Toul à Guiclan (Finistère), fouillée de manière pour le moins expéditive en 1868. Une première typologie de ces cavités et de leur remplissage pu être ensuite établie pour certains substrats géologiques seulement (granites et quartzites). A l'exception notable de la grotte marine effondrée de Ménez Drégan à Plouhinec (Finistère) occupée au Paléolithique ancien, la modicité des remplissages sédimentaires des cavernes armoricaines ne donne pas prise à des modélisations chronologiques de grande ampleur. L'intérêt qu'on leur porte est davantage dans la complémentarité fonctionnelle que leurs contenus archéologiques nous offrent en regard des sites de plein air. Dans le mobilier lithique, les phases d'usage et de réfection de l'outillage sont clairement surreprésentées, au détriment des phases de production. Cela plaide pour des usages logistiques de courte durée, dans des systèmes de mobilité différents, plus amples au Paléolithique final qu'au Mésolithique. Malgré leurs limites que cet article s'emploie à bien définir, ces premières fouilles ont bel et bien livré des signatures fonctionnelles très originales dans l'outillage ou dans les manifestations symboliques, qui engagent à réfléchir au rôle de ces petites cavernes dans les réseaux d'habitats du Paléolithique final et du Mésolithique.
While common and even iconic in the field of Prehistory, excavations in caves or rock-shelters are very rare in the Armorican Massif for the final Palaeolithic and Mesolithic. Why are these sites largely ignored by research in this part of France, when they form the basis of archaeological work in other parts of Europe? Are rock-shelters missing in Brittany? Of course not' Rock-shelters are actually numerous in Brittany. These sites differ however from the large caves of southern France. They have been neglected because of their small size and the shallow depth of their sedimentary deposits, and also because they do not correspond to the romantic idea people have of caves and rock-shelters??? This particular situation is essentially due to the geological context of Brittany, where the crystalline massif contains no limestone. Rock shelters are thus found in various specific contexts: naturally supported granite boulders, the foot of sandstone or schist cliffs, or marine erosion faults in granite, sandstone or schist contexts.
A new collective research programme, focused on the Late glacial and the Mesolithic, is now aiming to integrate these little known sites with a view to gaining a better understanding of the development the prehistoric palaeo-economic system. While much information has been obtained about Late glacial and Mesolithic societies in this part of Europe over the last twenty years, it essentially comes from large open-air sites that do not reflect the broad spectrum of site types making up the prehistoric palaeo-economic system. Whatever the dominant mobility system of a hunter-gatherer group, small sites are numerous and are essential to understanding the complexity of the system. These small sites are generally invisible in survey or are not examined by preventive archaeology. Investigating rock-shelters appears to be an excellent and easy way to study small sites since they have very small surface areas and are particularly easy to spot in the landscape. Since the socio-economic systems vary throughout Prehistory, our diachronic approach, which considers different environments and climates, enables us to study the development of cultural systems through time and examine how rock-shelter use changed over this long period. Although this research programme has just started, fieldwork has already been conducted in Finistère by the two authors of this paper (Pont-Glas in Plounéour-Menez, Kerbizien Huelgoat and the Rocher de l'Impératrice in Plougastel-Daoulas).
These sites offer a new insight into ways of living in small spaces. The first site is a fallen block shelter, very common in the granitic massif of Brittany. The site was first excavated in 2007 and 2008. Two main Mesolithic occupations have been identified, as well as a later occupation dated to the Iron Age (around 300 BC). The spatial analysis of the site, together with the study of the lithic assemblage, suggest that Pont-Glas is a logistic site where hunters or warriors sheltered over a short period. Kerbizien is another rock-shelter in a granitic context. The excavation carried out in July 2011 identified Tardiglacial (Azilian) levels at the back of the cave in a two metres wide band along the wall. The Early Azilian lithic industry is made up of curved back points, very utilized large blades and burin spalls. Its functional signature is original and seems quite compatible with the hypothesis of a logistic station (i.e. hunting camp) for very mobile human groups. Their knowledge of the local geological resources is a significant aspect to be kept in mind, showing that hunts were regularly made in this area.
Excavations at the Rocher de l'Impératrice are still in progress. This rock-shelter, at the foot of a high sandstone cliff overlooking the Brest roadstead, was mainly occupied during the Early Azilian. The evidence suggests this site was used by small groups of people for short periods. Activities seem to have focused essentially on game acquisition and processing. Yet contrary to Pont-Glas, there is some evidence for other activities in addition to hunting. The discovery of several dozen engraved (and sometimes coloured) schist tablets seems to point in this direction, indicating manufacture or/and use of these "symbolic" elements during the occupation of the shelter by the Early Azilians. Despite the limitations of their archaeological context, these initial excavations produced original functional signatures in tool-kits and symbolic activities, highlighting the role of small caves in settlement networks during the final Palaeolithic and the Mesolithic. These results contribute to a first attempt at modelling the use of rock-shelters in Brittany and the evolution of paleo-economic systems between the Late Glacial and the Late Mesolithic.
Pour être interprétées, les iconographies préhistoriques doivent être réinsérées dans leur contexte archéologique et culturel. A partir d'une contextualisation à différentes échelles, le présent article propose une relecture de deux images gravées sur les statues-menhirs centre-alpines du IIIe millénaire av. n. è., à savoir les figures circulaires et « a bandoliera ». Les premières sont gravées au sommet des statues-menhirs masculines et ont jusqu'alors été interprétées comme des figurations du soleil. Cette interprétation se base sur le présupposé selon lequel un même ensemble de caractéristiques formelles, un cercle radié notamment, possède une signification universelle, c'est-à-dire indépendante de son contexte de création. Or, plusieurs indices issus à la fois de l'iconographie elle-même et du contexte archéologique des Alpes centrales permettent d'envisager une lecture différente. La première objection que nous opposons à l'interprétation couramment admise est l'extrême variabilité morphologique de ces figures circulaires qui s'accorde mal avec une représentation conventionnelle du soleil. De plus, il s'agit bien de cercles et non de disques au contraire de ce qu'une représentation du soleil requiert en divers contextes culturels. Plus encore, la comparaison de ce que nous interprétons comme des individus de pierre, à partir notamment du contexte social et idéologique qui caractérise les Alpes centrales du IIIe millénaire, et en dépit de leur relative abstraction, aux autres corpus de statues-menhirs alpines suggère une seconde objection. Ces prétendues figures solaires sont absentes des autres secteurs géographiques alpins qui connaissent pourtant un phénomène idéologique semblable aux Alpes centrales. Le sommet des statues-menhirs accueille dans ces régions des figurations de colliers. Finalement, s'agissant de corps de pierre érigés sur des sites cérémoniels où des manipulations d'ossements humains sont attestées, l'interprétation des statues-menhirs requiert de prêter attention aux données funéraires qui permettent alors d'envisager une valorisation sociale importante des cultures de l'apparence dans les groupes chalcolithiques centre-alpins. En effet, sur les sites de tradition dite Civate les ornements corporels, et plus encore les éléments de colliers, prédominent parmi les objets déposés avec les défunts et en constituent la caractéristique essentielle. La contextualisation de l'iconographie permet ainsi la constitution d'un solide faisceau de données en faveur d'une relecture de ces figures. Nous proposons de reconnaître dans les cercles gravés au sommet des statues-menhirs masculines, des éléments de la culture matérielle des groupes chalcolithiques centre-alpins, des ornements corporels, et plus précisément de colliers.
La lecture d'une seconde image ambiguë, la figure « a bandoliera », est ici également révisée. Couramment interprétée comme la représentation en plan d'un enclos mégalithique, par comparaison à des structures d'habitat issues de contextes forts éloignés des Alpes centrales, cette image est associée aux figurations qualifiées de « topographiques ». Pourtant, une telle lecture constitue une réelle erreur méthodologique dans la mesure où elle extrait l'image non-seulement de son support (un corps de pierre) mais également de son contexte culturel. Aucun enclos mégalithique n'a jamais été découvert dans les Alpes centrales. Par conséquent, et en fonction du faisceau de données établi au sujet des figures circulaires, nous proposons de reconnaître dans la figure « a bandoliera », systématiquement gravée sur deux faces contigües, un ornement corporel propre à l'équipement masculin et porté sur l'épaule.
Ainsi, l'interprétation de l'imagerie gravée et plus particulièrement de certaines figures ambiguës, se doit de prendre en considération la nature des blocs érigés et le contexte archéologique. Cette contextualisation à différentes échelles permet d'envisager de nouvelles interprétations de ces images qui apparaissent dès lors comme l'indice d'une valorisation sociale des cultures de l'apparence au sein des groupes humains chalcolithiques.
To be interpreted, prehistoric imagery must be evaluated in its archaeological and cultural contexts. The body of material data of which images and effigies are an integral part is particularly important in order to avoid anachronisms and "anatopisms" (confusion of geographical contexts). Based on contextualization at different scales, this article proposes a reinterpretation of two frequent motifs characterizing the third millennium BCE statue-menhirs (or "stelae" i.e. standing stones) from the Central Alps: the circular figures and the so-called "bandoliera" figures.
During the third millennium BCE, coinciding with Copper Age 2 and 3, ceremonial sites with groups of statue-menhirs appeared in the Central Alps alongside similar developments in other European regions. These Central Alpine monoliths
from Valcamonica can be called the Camunnian group, and their rich imagery makes them outstanding. The typology of several artefacts allows this group's evolution to be divided into three chronological phases (the usual prefix, III, will be omitted): A1 (2900-2500/2400 BCE), A2 (2500/2400-2200 BCE) and A3 (2200-2000 BCE). Only the A1 imagery the most problematic will be considered in this article.
At least two subsets of statue-menhirs can be recognized from their engraved images as well as the shape and size of the stone blocks employed. Set 1 bears images of daggers, "halberds" axes, belts, animals, and sometimes ploughing. Set 2 is only engraved with body ornaments. This dualistic pattern is also present in the neighbouring regions. Particularly in the Trentino-South Tyrol to the east, monoliths with ornaments also display sculpted breasts, suggesting the existence of a gendered distinction between male and female monoliths. The circle and "bandoliera" images discussed in this article are typical of male iconography.
The Camunnian group shows several distinctive features compared with statue-menhirs of neighbouring regions. The erect boulders have an abstract human shape suggesting a representation of individuals. However, at the same time, anthropomorphism is unclear or absent from the actual imagery. It follows that engraved images, not being directly connected with recognizable body parts, are often difficult to interpret. That is the case with both the motifs we are dealing with in this article, which appear very abstract to present-day observers.
The circular figures are engraved at the top of male statue-menhirs and, until now, have been interpreted as representations of the sun. This intuitive idea rests on the presupposition that the same set of formal attributes "a circle with or without rays" should have a universal meaning, independent of its cultural context. However, various lines of evidence from both the imagery itself and the archaeological context of the Central Alpine Copper Age suggest a different interpretation. First, there is the large morphological variability of the circular figures, which is inconsistent with a conventional, socially accepted representation of the sun. Secondly, these figures are circles, not discs, i.e. the reverse of the most widespread norm for representing the sun in known ethnographic contexts. Moreover, both a reappraisal of the social and ideological context characterizing the third millennium BCE Central Alps, and a comparison of the Camunnian monoliths with those of the neighbouring regions, strongly indicate that despite their relative abstraction in the Central Alps the statue-menhirs are effigies of individuals. This leads to a third objection: the so-called "sun disc" is absent from all other Alpine regions, although sharing the same broad ideology. In these other regions, it is figurations of necklaces that appear at the top of statue-menhirs.
Finally, dealing with an ideology where manipulation of funerary "relics" is attested at the same ceremonial sites including erect stone bodies, any interpretation of statue-menhirs demands that attention be paid to the funerary context. In the Copper Age Central Alps this context can be equated with the so-called Civate funerary tradition, in which what we may call the "culture of appearance" clearly possessed an important social value. Body ornaments, particularly elements from necklaces, indeed predominate among the objects deposited with the dead, characterizing the Civate sites. When all the above lines of evidence are brought together, the Camunnian circular figures emerge as elements of the material culture of the groups involved, and more specifically necklaces.
The second ambiguous image examined, the "bandoliera" figure, is systematically engraved on two contiguous faces of the statue-menhir. In spite of this, it has been commonly interpreted as the representation in plan of a megalithic enclosure, based on comparison with dwelling or ceremonial sites far away from the Central Alps (including southern France, Portugal, or even Stonehenge). This motif is considered to be part of so-called "topographic" imagery. However, such an interpretation is problematic on methodological grounds, being divorced from both its medium (a stone effigy of an individual) and its cultural context. No megalithic enclosures have so far been found in the Central Alps. Depending on the same body of data summarised above in connection with the circular figures, we propose to interpret the "bandoliera"motif as a male body ornament ? or part of equipment ? worn on the shoulder.
Contextualization of imagery enables a more robust body of evidence to be built in order to identify and interpret the motifs. In Alpine cases, notably from the Copper Age of Valcamonica, the interpretation of engraved imagery and especially of ambiguous figures needs to take into account the ontology of the erected monoliths and the cultural and archaeological context. There is always a risk, in the archaeology of ideological phenomena, of producing discourses or theories disconnected from the archaeological contextual base. We must not ascribe to the monoliths a meaning patently unsupported by the material evidence, be it universal sun images or megalithic plans. Contextualization on different scales is essential for an "archaeology of images" and is equally valuable to avoid misinterpretations. This paper has allowed new interpretations to be proposed for the Camunnian circular and "bandoliera" motifs: images that, accordingly, belong in the social enhancement of bodily symbolic display ? or the "culture of appearance"? of the Copper Age groups involved.
Le site de Marigny, à Sauvigny-les-Bois (Nièvre) occupe un rebord de plateau bordant à l'est la vallée de la Loire. Il a fait l'objet d'une fouille préventive réalisée en 2006. La surface du site fouillée est de 1200 m² et ne représente qu'une portion du site qui s'étend au nord. Le niveau archéologique est peu enfoui, en grande partie érodé et fortement perturbé, notamment par des phénomènes cryogéniques. La séquence sédimentaire est peu développée mais marquée par deux événements périglaciaires majeurs qui encadrent le niveau paléolithique. L'occupation du site apparait ainsi antérieure au dernier maximum glaciaire situé entre 16 et 20 ka BP.
Les vestiges archéologiques mis au jour sont exclusivement lithiques et proviennent principalement d'une zone de près de 540 m² formant un replat à mi-pente, au centre de la surface fouillée. Un total de 11'157 restes lithiques a été mis au jour, dont 10'039 dans la partie centrale du site. Les matières premières sont principalement des silex du Dogger d'origine locale et seules six pièces sont exogènes, avec pour cinq d'entre elles des sources d???approvisionnement connues dans la vallée du Cher.
La composition de l'industrie témoigne d'une production laminaire dominante et d'une production lamellaire secondaire en partie dépendante de la première. Les paramètres généraux de la production laminaire sont une organisation unipolaire, initiée par une crête antérieure et une percussion tangentielle pour une production récurrente de lames de différents gabarits mais de profil plutôt rectiligne, courbe pour les plus grandes. Les outils sont rares (0,5 % de la série) et comptent principalement des outils sur lames (grattoirs minces, burins et pièces retouchées). Le tamisage partiel des secteurs les plus denses en vestiges a permis la récolte des plus petits éléments, dont les lamelles et microlamelles. Celles-ci proviennent de nucléus sur masse ou sur lame, utilisant alors des lames de grand gabarit de section triangulaire, exploitées frontalement. Les lamelles présentes dans l'industrie sont de morphologie ovalaire allongée à triangulaire, de profil plutôt rectiligne, rarement tors ou courbe, et mesurent entre 15 et 40 mm de longueur, les plus courtes étant issues des nucléus sur éclats. L'examen macroscopique de ces pièces n'a révélé aucune pièce aménagée. En l'absence d'un calage chronologique strict, la composante technotypologique de l'industrie représente l'unique ressource pour estimer l'âge de l'occupation. En l'état actuel des données, elle permet un rapprochement du site de Marigny avec l'Aurignacien ancien ou récent. Les données encore lacunaires pour le Bassin parisien, astreint à des comparaisons à longue distance principalement tournées vers le sud-ouest de la France, se doivent d'être considérées avec une certaine réserve. Toutefois, la partie centrale de la France, de la vallée du Cher à la vallée de la Saône, compte quelques sites Aurignaciens qui de façon plus prégnante que dans les régions plus septentrionales peuvent être le témoignage d'une certaine continuité territoriale avec les groupes aurignaciens de la moitié sud de la France.
The site of Marigny, Sauvigny-les-Bois (Nièvre), is located on the edge of the plateau to the east of the Loire valley. It was excavated in 2006 over 1,200 m2 and has yielded an Early Upper Palaeolithic level extending northwards. The archaeological level is only lightly buried, largely eroded and more or less perturbed by cryogenic processes. The sedimentary sequence, which is not very thick, is disrupted by two major periglacial events that frame the Palaeolithic level. Thus, the site is prior to the last glacial maximum between 16 and 20000 BP.
The archaeological remains are exclusively lithic. Most come from an area of nearly 540 square metres forming a flat level in the centre of the excavated area. A total of 11,157 lithic remains were discovered, of which 10,039 were in the central part of the site. The raw materials are mainly local Dogger flint. Only six pieces are exogenous, with five of them from known sources in the Cher valley (about 50 - 100 km west of Marigny).
The spatial pattern of the different categories of remains on the site shows no specific distribution. Refittings are concentrated and refittings of pieces broken by freezing show no movement beyond the square metre. While these data cannot distinguish the time or the frequency of visits to the site, they seem to indicate a certain coherence of the lithic production on the site.
The composition of the Marigny industry is dominated by blade production followed by that of bladelets, which depends partly on the former. The blade production is unipolar, initiated by a natural ridge or prepared crest, with tangential percussion for the recurrent production of blades of various sizes with profiles that are rather straight for the shortest and curved for the larger ones. Tools are rare (58 artefacts, 0.5% of the series) and are mainly represented by tools on blades (thin end-scrapers, burins and lateral retouched pieces, a few rare side-scrapers). Partial sieving of the sectors with the densest remains enabled the collecting of the smallest elements, including bladelets and microbladelets. These were knapped from core blocks or, more frequently, blades, which in that case were large blades with a triangular section, exploited frontally. The bladelets present in the industry have an elongated oval to triangular morphology, with a rather rectilinear profile, rarely twisted or curved, and measure between 15 and 40 mm in length, the shorter coming from blade cores. Macroscopic examination of these bladelets revealed no retouching.
The lithic industry of Marigny is a blade-bladelet integrated system where blade production is central, on the one hand to produce tools on blades (end-scrapers, retouched blades, burins???) and on the other hand to produce the large thick blades used for careenated nuclei. The raw material exploited came from near the site and the lithic material composition (refittings) presents a primary laminar products deficit. These elements allow us to propose that the occupation of Marigny could represent a site for lithic production, partly exported.
In the absence of any strict chronological timing, the techno-typological component of the industry is the only means of estimating the age of the occupation. The lack of retouched or used bladelets removes part of their production targets, and thus, comparisons only concern the production, without knowing all the objectives. With the current data, the geological study shows that Marigny cannot be contemporary or subsequent to the Badegoulian, and its industry has more in common with the Aurignacian than with the other Upper Palaeolithic industries.
Marigny presents different points of convergence with the recent Aurignacian (microbladelets from careenated nuclei) but also with the Early Aurignacian (no retouched blades, no busked burins). However, we should remain cautious regarding the attribution of Marigny to one or the other of the Aurignacian ???technocomplexes??? defined in the southwest of France insofar as the ???Aurignacoidal??? groups (i.e. comprising Aurignacian characters for industries prior to the Gravettian) may attest to regional characteristics resulting from their specific history.
Some evidence from the best documented Aurignacian sites in the southern Paris Basin show a real continuity with the models established in the southern half of France. This is manifest in the more southern sites, such as the Cottés (Vienne département) for which new data are available, but also, a little further north, for Mareuil-sur-Cher. Despite the lack of discriminating elements, the lithic composition of the Marigny industry shows no original elements compared with these Aurignacian sites and, thus, it seems possible to include it in what today composes the Aurignacian in the southern part of the Paris Basin. However, it seems that in the central part of France, from the Cher valley to the Saône valley, some Aurignacian sites, more clearly than in the more northern regions, can reveal some territorial continuity with the Aurignacian groups in southern France. The Marigny settlement results from raw material exploitation by the same groups and therefore represents a step into a territory which, in the light of the data regarding the raw materials, is located along an East-West line.
Le Gravettien oriental est encore trop souvent réduit à sa manifestation la plus spectaculaire : la « culture de Kostienki-Avdeevo ». Certains sites ont pourtant livré des industries lithiques qui s'en démarquent très nettement. C'est le cas du gisement de Kostienki 4 auquel nous consacrons cette étude. Ce site a livré deux occupations généralement rapportées au Gravettien lato sensu, et prenant place entre 21000 et 23000 uncal. BP. L'ancienneté des fouilles, autant que l'absence d'études archéozoologiques rendent la documentation disponible souvent parcellaire. En confrontant, pour la première fois, les données inédites de l'industrie en matières dures d'origine animale de Kostienki 4, aux autres sphères de la culture matérielle, nous avons pu mettre en évidence de nouveaux éléments de caractérisation de ses deux phases d'occupation. Nous verrons que ce sont des groupes indubitablement différents qui s'y sont succédés, et probablement à différentes saisons de l'année. Des différences majeures transparaissent dans les matières osseuses exploitées, dans leur transformation et leur utilisation, questionnant sur la pertinence d'un rattachement de ces deux niveaux d'occupation à une même entité culturelle. Enfin, les différences observées entre les deux habitats du niveau inférieur, nous permettront de discuter d'une éventuelle différentiation fonctionnelle ou sociale de l'espace.
Although the Eastern Gravettian culture is famous for its mammoth ivory objects (sculptures, decorated objects, tools), very few techno-economic analyses of the industries made of other osseous materials have been undertaken. The characterization of know-how in these societies, which is very particular in many ways, is an underexploited area of investigation in relation to the potential information that can be drawn from it. The Eastern Gravettian is, moreover, still often reduced to its most spectacular expression: the ???Kostienki-Avdeevo culture???. Some sites have however yielded outstanding lithic industries, showing strong affinities with certain industries in Western Europe. This is the case for Kostienki 4, to which we dedicate this study. This site has yielded two layers deposited between 23000 and 21000 uncal. BP. The age of the excavations as well as the absence of essential data such as archaeozoological studies make the available documentation often incomplete. Taking into account, for the first time, all the data on the osseous industry from this site, and comparing them with other material culture data, we identified new characterization criteria for both the archaeological layers of Kostienki 4. We will demonstrate that different groups undoubtedly succeeded each other on this site, and probably at different seasons of the year. Major differences are well reflected in the raw materials used in the osseous industry, in their processing and their use. These differences were already evoked by the data on the lithic industry and the radiocarbon results as well as by the spatial structures of the site, which differ greatly between the two occupation levels. There also appear to be differences in the game hunted, reflecting a change in subsistence strategies between the two layers. These were probably also conditioned by the season and the duration of the occupation of each level. Fur-bearing animals, primarily hare, hold a significant place in the economy of the inhabitants of the lower layer (hide working, bone tools), whereas this type of game has become marginal in the upper layer. These economic differences are accompanied by major changes in the field of symbolic production. The nature of the ornaments made of osseous materials was dramatically modified during the occupation of the site, and many soft stone figurines appear in the upper layer, as do new techniques, such as the polishing of stone, the extraction of rods by the groove-and-splinter technique, and the extraction of discs by bifacial circular grooving. The upper layer is also the only one which yielded some highly invested objects (geometric designs, a higher transformation factor).
Beyond these differences between the two layers of the site, there are also differences (distribution of the game hunted, osseous equipment) between the two settlement areas of the lower level. They reflect a possible functional differentiation and perhaps even a social differentiation of the domestic space. Ultimately, all these elements raise questions about the relevance of linking the two archaeological layers to the same cultural entity.
Le Magdalénien supérieur se développe durant la fin de l'épisode d'Heinrich 1 (Dryas ancien) et l'inter-stade du Bölling. Cette période est marquée par une recomposition des biotopes et la réouverture de territoires pour les groupes humains. Cette culture connaît dorénavant une extension à l'échelle de l'Europe et plusieurs modèles de mobilités territoriales sont proposés dans différentes régions (Bassin parisien, plateau Suisse, Rhénanie). Ces modèles sont basés sur l'alternance saisonnière de chasses spécialisées sur le renne et le cheval ou de chasses de ces ongulés en proportion égale. Dans le Sud de la France, les spectres de chasse se diversifient au profit d'ongulés forestiers ou montagnards mais également de petits gibiers. Les chasses spécialisées y sont exceptionnelles. L'abri Faustin, situé dans le Nord du Bassin aquitain, est un des rares gisements du Sud-Ouest de la France appartenant au Magdalénien supérieur ayant livré un spectre faunique majoritairement dominé par le cheval. Malgré cette singularité, ce gisement n'a jamais fait l'objet d'une étude archéozoologique détaillée. De nouvelles datations récemment effectuées dans le cadre du projet « Magdatis » ont permis de confirmer une occupation contemporaine de l'interstade du Bölling. Nous proposons ici une étude détaillée des stratégies de prédation, de transport ainsi que des pratiques bouchères employées sur le cheval au cours du Magdalénien supérieur. L'étude taphonomique a mis en évidence une excellente préservation des restes osseux et dentaires permettant la mise en oeuvre d'une étude archéozoologique à haute résolution. Par ailleurs, les remontages montrent une dispersion limitée des vestiges. Le cheval est l'espèce dominante en termes de nombre de restes et de quantité de ressources, même si son exploitation ne marque pas une spécialisation dans les activités pratiquées sur le site. Les Magdaléniens ont privilégié les groupes familiaux, plus prévisibles, aux groupes de célibataires. Les indices de saisonnalité révèlent que les épisodes de chasse se sont répartis tout au long de l'année. La présence de toutes les portions squelettiques sur le gisement et de restes de foetus va dans le sens d'un transport de carcasses entières. Cela nous amène à conclure que le site d'abattage devait se trouver dans les environs immédiats de l'abri. La reconstruction de la chaîne opératoire de boucherie montre que le cheval a été exploité pour ses ressources alimentaires (viandes, moelles et graisses) mais également utilitaires. Les résultats de notre étude révèlent de nombreux points de convergence avec les gisements dominés par le cheval et contemporains de l???occupation de l'abri Faustin en Rhénanie, sur le plateau Suisse et dans le Bassin parisien (Bignon, 2003; Street et al., 2006; Müller, 2014).
The Late Magdalenian coincides with the end of the Heinrich 1 (Oldest Dryas) event and the Bölling interstadial. This period was marked by the recomposition of biotopes and the reopening of territories to human groups. The culture began to expand throughout Europe and territorial mobility models have been proposed for several regions (Paris Basin, Swiss Plateau, Rhineland). These models are based on the seasonal alternation of specialized hunting of reindeer and horse or the hunting of these ungulates in equal proportions. In the south of France, hunting was more diversified and included greater proportions of forest and mountain ungulates and small game. Specialized hunting was rare. Abri Faustin, situated in north of the Aquitaine Basin, is one of the few sites in the south west of France dating to the Late Magdalenian with a faunal spectrum dominated principally by horse. Despite this particularity, the site has never been subject to a detailed archaeozoological study.
New datings recently performed as part of the Magdatis project have confirmed an occupation contemporary with the Bölling interstadial. We here propose a detailed study of the hunting strategies, transport, and butchery practices carried out on horses at this site. The methods that were used are conventional in zooarchaeology: age determination, quantification of skeletal elements and observation and quantification of natural and anthropogenic marks. The bone assemblage contains 1453 bone and dental remains. A taphonomic study has revealed the excellent preservation of these remains, allowing a high-resolution archaeozoological study to be performed. Moreover, the bone refits shows that the dispersal of the remains is limited. Horse is the dominant species in terms of the number of remains (NISP = 853), number of specimens (MNI = 20) and quantity of resources. Its exploitation does not appear to represent a specialization in terms of the activities carried out on the site in view of the food and utilitarian exploitation of small game (Le Bail, 2005; Mallye, 2007; Val, 2009) and the presence of domestic lithic and bone tools. The Magdalenians favoured family groups, which were more predictable, rather than singles groups. Seasonality indices show that hunting episodes took place throughout the year. Hunting of singles groups did occur but was more opportunistic than that of family groups. Hunting strategy can be presumed but not clearly demonstrated. We presume that the Magdalenian took advantage of the topography of Entre-deux-Mers to approach the groups of horses.
High disparities in skeletal representation cannot be explained by differential preservation and food utility indices (FUI and MUI) are not correlated with the survival percentage. We assume that whole horse carcasses were transported from the kill site to the base camp. The presence of foetal remains supports this hypothesis.This leads us to conclude that the kill site must have been located in the immediate vicinity of the shelter. The reconstruction of the butchery processes implies that horses were exploited both for their food resources (meat, marrow, and fat), and for utilitarian and symbolic purposes. We propose the use of a bone boiling method for the extraction of marrow from spongy shafts and of fat from long bone ends. The results of our study reveal many common elements with sites dominated by Horse, contemporary with the occupation of Abri Faustin, in the Rhineland, on the Swiss Plateau, and in the Paris Basin (Bignon, 2003; Street et al. 2006; Müller, 2014): seasons and hunting strategies, proximity of the kill and processing sites, exploitation for food and utilitarian and symbolic purposes. Carcass exploitation was always optimal, with extraction of fat and marrow from mandible and long bones. Even if the use of horse bones for utilitarian and symbolic purposes was never systematic in the Late Magdalenian, we see it sporadically on some sites. All these observations suggest a certain uniformity in the exploitation of this ungulate across Europe during the Late Magdalenian.
En 2010, lors d'une fouille protohistorique (responsable : É. Millet, INRAP), une petite occupation mésolithique a été reconnue puis fouillée sur le site du « Haut-de-Vallière » à Rosnay (Marne). L'intervention de sauvetage, relativement courte, a permis de cerner une concentration de 20 m² et de prélever l'ensemble du mobilier par quarts de mètres carrés. Contre toute attente, ce gisement implanté sur le haut d'un versant en pente douce d'une petite vallée d'un affluent de la Vesle, s'est avéré homogène tant sur le plan chronologique que fonctionnel. Le recouvrement du niveau s'est effectué par des dépôts de pente de sables fins qui composent le versant (butte tertiaire). L'absence de pendage et la répartition plane des vestiges, permettent d'envisager une implantation privilégiée sur un replat ou dans une cuvette. Les vestiges, des silex taillés, pierres (grès), quelques restes osseux brûlés et de rares fragments de coquilles de noisette brûlées, se répartissent ici autour d'un foyer. Un fragment osseux calciné et une coquille de noisette brûlée ont permis la réalisation de deux datations très cohérentes qui placent l'occupation à la fin du Préboréal, entre 8628 et 8340 avant J.-C. Cette attribution chronologique apparaît en adéquation avec l'assemblage microlithique, dominé par les segments associés aux pointes à base retouchée, et attribué au technocomplexe Beuronien nord-occidental (Ducrocq, 2001 et 2009). Cette cohérence chronoculturelle est confortée par la fonction du site spécialisé dans le travail des peaux (raclage et découpe). En effet, de nombreux grattoirs, utilisés et ravivés sur place caractérisent l???outillage domestique. Parallèlement l'analyse tracéologique a mis en évidence une utilisation des grattoirs pour le raclage de peaux sèches ou en cours de séchage, tandis que le raclage de peaux humides, probablement traitées à l'ocre, semble avoir fait appel à des produits plus ou moins allongés, dont le tranchant a été utilisé brut. Dans une moindre mesure, des activités de boucherie et du travail des plantes ont également été réalisées sur le site, notamment à l'aide de tranchants bruts (éclats, lames ou lamelles). L'analyse archéozoologique a permis d'identifier la présence du sanglier, essentiellement représenté par des éléments de bas de pattes calcinés, pouvant aussi témoigner d'activités bouchères et du travail des peaux. Les activités de taille du silex dédiées essentiellement à la fabrication d'armatures de flèches à partir de lamelles, apparaissent ici secondaires. La répartition spatiale des vestiges et des résultats fonctionnels, révèle une certaine organisation des différentes activités, en particulier le travail des peaux, autour du foyer. L'analyse tracéologique réalisée ici a révélé la présence d'activités variées, aussi bien à l'aide d'outils retouchés que de tranchants bruts (éclats ou lamelles non retouchés). Toutefois, le spectre fonctionnel reste limité et plaide en faveur d'une occupation domestique spécialisée de courte durée. Parmi l'outillage, on note la présence particulière, en position de rejet, d'un fragment d'outil prismatique en grès quartzite, objet caractéristique du premier Mésolithique du Bassin parisien. Il s'agit ici d'une des extensions les plus orientales de ce type d'objet après un exemplaire découvert dans les Vosges (Pressager et al., 1997). Au regard des données régionales peu nombreuses, la découverte du site de Rosnay prend tout son intérêt. Il s'agit en effet d'un des rares sites mésolithiques bien conservé et datés de la région Champagne-Ardenne. Par ailleurs, l'occupation mésolithique de Rosnay, par sa spécialisation fonctionnelle et l'organisation des activités s'intègre parfaitement aux problématiques actuelles visant une reconstitution palethnographique.
In 2010, during the excavation of a protohistoric site (dir.: E. Millet, INRAP), a small Mesolithic occupation was identified on the Haut-de-Vallière site, Rosnay (Marne). The brief rescue operation allowed the identification of a 20 m² concentration and the collection of all artefacts by quarter square metre units. Against all odds, homogeneity and consistency of the site are attested by chronological and functional data despite its location at the top of a gentle slope of a small valley and its sealing by sandy slope deposits (tertiary residual hill). The Mesolithic level is well preserved and there is no mixing with other periods. The absence of a dip and the flat distribution of the remains allow us to envisage an installation on a ledge or in a hollow. The remains, set around a hearth structure, are characterized by the presence of flints, stone (sandstone), some burnt bone remains and rare fragments of burnt hazelnut shells. The hearth is a carbonaceous and sub-circular area (1.80 m²), with some dispersed sandstones. Two very consistent dates, one on burnt bone and one on burnt hazelnut shells, place the occupation at the end of the Pre-Boreal between 8628 and 8340 cal. BC. This chronological attribution appears in line with the microlith assemblage, dominated by crescents and retouched base points, assigned to the ???north-western Beuronian??? technocomplex (Ducrocq, 2001 and 2009). 1,463 lithic remains were discovered. 45.9% are splinters. Domestic tools (82) are more numerous than microliths (27), with many scrapers (51). These scrapers have various morphologies; they are manufactured on flakes or blades, in tertiary or secondary flint. Those in secondary flint were more used and re-sharpened. Usewear analysis proves their use in skin scraping activities. Retouched flakes, blades and bladelets are also present as well as some rare burins.
The chronocultural consistency is reinforced by the function of the site, specialized in skin-working (scraping and cutting), confirmed by the usewear analyses of many scrapers. In parallel, the usewear analyses have highlighted different treatments of skins, with scrapers used on dry skins or during the drying process and unretouched flakes or blades on moist skins, probably in association with the use of ochre. To a lesser extent, butchery and plant-related activities were also identified on the site with unretouched flakes and bladelets. 138 osseous remains were collected, mainly burnt. The archaeozoological analysis identified the presence of wild boar, mainly represented by charred lower leg parts that can also reflect butchery activities and skin-working. Flint knapping activities were mainly dedicated to the manufacture of arrowheads from regular bladelets. Some microburins were discovered. However, the use of various raw materials (tertiary and secondary flint) reveals the segmentation in space and time of the bladelet ???chaine opératoire???. Some cores seem to have been imported already preformed while others were taken away after being knapped on the site. The spatial distribution of remains and functional results revealed the organization of the various activities identified around the hearth. Skin scraping and cutting, butchery and plant-related activities are located apart from microlith manufacturing (east of the hearth). Skin scraping was located at two separate places depending on the tools used: scrapers (north-west of the hearth) or unretouched tools (east). Plant-related activities were more dispersed, in several places. Through usewear analysis, various activities have been identified on the Rosnay site, involving both retouched tools and unretouched flakes or bladelets. However, the functional spectrum is limited (plant scraping and splitting, butchery and skin scraping and cutting) and argues in favour of a relatively short and well-specialized domestic occupation. Among the tools, and not far from the hearth, we note the presence of a prismatic tool fragment of quartzite sandstone, characteristic of the early Mesolithic in the Paris Basin. The raw material is a glossy sandstone, deposits of which are known in the Aisne département near Soissons (Vauvillé, 1891) and in the Tardenois region (Rozoy, 1978), as well as in Ile-de-France (Griselin, 2010; Griselin et al., 2013). This is one of the most eastern discoveries of this kind of tool after an example found in the Vosges (Pressager et al., 1997). In view of the poorly documented regional context, the discovery of the Rosnay Mesolithic occupation is particularly interesting. This is indeed one of the rare dated Mesolithic sites in Champagne-Ardenne. The good conservation of the site and its location on the slope of a sandy hill are uncommon. Indeed, well-preserved and dated Mesolithic sites on hillsides or plateaux are generally rare in northern France; over the last decade most finds have been located in valleys (Ducrocq, 2001; Fagnart et al., 2008; Lang and Sicard, 2008; Seara et al., 2002; Souffi, 2013). Furthermore, the Mesolithic occupation of Rosnay, by its functional specialization and spatial organization, is perfectly integrated in current problematics aimed at palethnographic reconstitutions.
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